mardi 19 mai 2020

Paul Iribe: Un touche à tout de génie que le bijou a intéressé avec succès et Coco Chanel qui fut sa dernière amante.



Paul Iribe est né en 1883 et décédé assez jeune en 1935, il fut  décorateur, illustrateur et artiste, précurseur de l'Art Déco, l'un des acteurs majeurs de la scène artistique du début du 20ème siècle. Grand artiste aux disciplines multiples,  il a collaboré avec les plus grands noms, du couturier Paul Poiret en passant par Jean Cocteau, Cecil B. DeMille,  Il fut l'époux de la comédienne Jane Dirys  et l amant de Coco Chanel, pendant les dernières années de sa vie. 

La grande Colette d'après Edmonde Charles Roux disait:
Pourquoi Colette redoutait-elle Iribe au point d'esquisser des gestes d'exorcisme à son approche? Il est clair que le nouveau « fiancé » de Gabrielle lui inspirait la plus vive suspicion. Une sorte de défiance animale au regard de ce qui est frelaté? On ne peut être Colette sans cet obscur instinct. Iribe était le pseudonyme que s'était donné Paul Iribarnegaray à ses débuts dans le dessin satirique, autour des années 1900. Contemporain exact de Gabrielle, il était né en 1883 à Angoulême, de parents basques. Et, bien qu'un solide vernis mondain, autant qu'un certain cosmopolitisme lui aient ôté toute marque de terroir, lui restait un accent indéfinissable, d'où les bezers que l'on trouve sous la plume de Colette, allusion au parler d'Iribe et à ce zézaiement que trente ans de parisianisme n'étaient pas parvenus à effacer. Ses débuts ne sont pas sans rappeler ceux de Cocteau, comme lui subjugué par les gloires du jour et au plus haut point atteint de ce « mal rouge et or» qu'était la folie du théâtre. D'un certain théâtre toutefois, celui dont le Paris d'alors se gargarisait : le vaudeville. Mais les débuts d'Iribe furent plus ardus que ceux de Cocteau. Son père, journaliste, contrecarrait sa vocation. Paul ne rêvait que dessin. Il fut placé à seize ans typographe à l'imprimerie du Temps. Deux ans plus tard, il quittait son emploi et s'inscrivait au cours d'architecture des Beaux-Arts. Iribe n'avait que dix-sept ans à l'époque où l'Assiette au beurre  publia ses premiers dessins 




Dans ses nombreux dessins Paul Iribe n'était pas tendre  avec la CGT ou le communisme,pourtant Paul est le fils de Jean-Jules Iribe (Pau 1836 - 1914), ingénieur du cadre auxiliaire des travaux de l’État, qui fut rédacteur au journal Le Temps, c'est lui qui fut chargé le  d'abattre La Colonne Vendôme

Le père de Paul était revenu en France depuis 1880, et Paul  Naquit en 1883.
Paul vécut à Madagascar une partie de son enfance .
Tout Français pouvait obtenir une concession gratuite. Elle devait être d'un seul tenant et ne pouvait dépasser 100 ha L'attribution des concessions de terres domaniales à Madagascar a été régie durant toute la colonisation.
Paul vint poursuivre ses études à Paris, mais devant son peu d'empressement  pour étudier il fut placé en apprentissage comme Typographe au quotidien "Le Temps" car son père en était devenu le rédacteur.
C'est sans doute ce qui decidé de sa vocation et de son goût  pour le graphisme et son premier dessin parut dans "le Rire" en 1901 et ensuite dans de nombreux journaux.


Il fonda son premier journal "Le Témoin" en 1906 avec les meilleurs graphistes satiriques du moment, mais alors qu' il aimait la satire, il était aussi attiré par son contraire, "Le Luxe,  l 'élégance, la frivolité" c'est pourquoi le grand couturier Paul Poiret lui demanda de réaliser une édition de ses dessins  de robes destinée a être adressée aux grandes dames du monde entier.
Iribe créa donc "les Robes de Paul Poiret"  et   d'autres ouvrages de luxe   en 1911 et dans les années 30 "Rose Noir  Blanc et rouge , Choix, la marque France, Défense du Luxe etc, que publia Draeger." 




1908 revue pour Paul Poiret

C'est justement cela que dit Poiret : « Comme par hasard Iribe avait besoin d'argent. Je lui versai le montant de ses premiers dessins et il disparut. Le temps me sembla long pendant lequel il ne revint pas. J'avais négligé de lui demander son adresse. Quand il m'apporta des croquis, je fus enchanté de la manière dont. il avait compris et interprété mes modèles et je lui demandai d'achever rapidement son travail [...] Et d'abord, lui dis-je, donnez-moi votre adresse que je puisse correspondre avec vous. Il me. répondit qu'il n'avait pas d'adresse fixe à Paris mais qu'il prenait tous les matins son petit déjeuner chez Mme L. Puis après avoir touché un nouvel acompte, il s'éclipsa de nouveau. J'eus beaucoup de mal, cette fois, à le ramener et à obtenir livraison de son travail. Je crois me rappeler que je dus le menacer assez sérieusement : Edmonde Charles Roux



Devenu célèbre, on le sollicite pour des illustrations diverses telle cette publicité.
"Les Robes de Paul Poiret racontées par Paul Iribe " Un exemplaire en fut adressé à chaque souveraine d'Europe. Toutes réservèrent bon accueil au prestigieux cadeau, à l'exception de la reine d'Angleterre qui le fit retourner à l'envoyeur avec une lettre de sa dame d'honneur priant le couturier de s'abstenir à l'avenir d'envois de cette espèce... Un Iribe sans le sou, sans domicile fixe, attendant des paiements anticipés pour aller dans les beaux quartiers se faire admirer et nourrir par Mme L., tout dans cette description suscite des sentiments contradictoires. Qu'est-il au juste, séducteur ou gigolo? Mais c'est en donnant à sa collaboration avec Cocteau la forme d'une association qu'Iribe prit définitivement pied dans la vie parisienne". E Charles Roux



Je suis étonné de voir sur cette carte d invitation de 1910 pour le vernissage de l' exposition de ses bijoux, la fameuse Aigrette datée dans la collection "Al Thani" en 1911. Mais je ne vais pas chipoter!






Mais cette exposition est bien confirmée dans un Figaro de 1910 , mais que dit le Figaro?

" On connait ce curieux et personnel artiste. déformateur du réel, ironique dessinateur des évènements et des travers dont il est le "témoin" mais on aurait tort de se faire une idée préconçue de ce que Paul lribe a pu réaliser en éxecutant des bijoux et en les exposant chez un Joaillier tel que M. Robert Linzeler. 
On se tromperait en attendant de lui du tourmenté,du paradoxal et du bizarre. Seuls les gens qui savent analyser minutieusement les talents originaux. ayant discerné dans l'art de Paul lribe autant d'élégance  que de comique auraient pu prévoir que le bijou étant un objet raffiné entre tous, c'est à la première de ses facultés que  l'artiste aurait recours.
Ce sont surtout des lignes calculées avec une grande finesse .pour faire valoir les tons puissants des pierreries, ou la caresse des perles étalées en grappes.
.On pourrait dire que ces bijoux allient la discrétion au luxe, ce qui est toujours
difficile. Telle aigrette est comme un  léger feu d'artifice sur la peau. Telle ferronnière évoque l`idée  d`un ornement antique sur un front rayonnant de jeunesse. Et, sans 'appuyer' autrement ces sortes de rapprochements, il y  a 
quelque analogie entre ces parures éclatantes et légères et les "fire-Works" que 
Whistler fit briller dans ses nocturnes "



Voici "Telle aigrette est comme un  léger feu d'artifice sur la peau" dont rend compte le FIGARO telle qu "elle fut exposée au grand palais avec la collection de son altesse l'émir du Qatar : Hamad bin Khalifa bin Hamad bin Abdullah bin Jassim bin Mohammed Al Thani 

Paul Poiret était fasciné par l inde et mit le turban à la mode en même temps que les robes longues brodées de perles colorées.
En 1910 triomphe le ballet Shéhérazade , livret de Jean Cocteau , autre ami de Paul Iribe et musique Nikolaï Rimski-Korsakov.
En plein phénomène "Sheherazade" Paul Iribe va dessiner  une collection de bijoux pour le joaillier Linzeler qui va la fabriquer. je vous recommande la lecture de mon article sur les Linzeler.

Il semble que, de tous ces bijoux réalisés par Iribe pour  Linzeler , il ne subsiste que cette merveilleuse aigrette,  mais il est possible d'écrire que les codes géométriques de l'Art déco sont déjà parfaitement en place dès 1910.

Par chance grâce à notre bibliothèque nationale le N° de "Art et Décoration" de janvier 1911 nous permet de voir certains bijoux de cette collaboration de Iribe et Linzeler.




Que disait  cet article? quelques extraits.

On recherchait une évidente simplicité, on combinait des lignes presque géométriques et on arrivait ainsi à une sécheresse très distinguée, mais aussi à une pauvreté de goût très fâcheuse   dans la partie de l'art décoratif  dont la matière est le plus opulente.
Mais on voulait s'affranchir des deux tendances d'après lesquelles depuis vingt ans les joailliers avaient travaillé, la première celle de Lalique, la seconde celle de Cartier, réaction déjà contre la première. Le bijou exécuté d'après la conception de Lalique, était le plus souvent un bijou charmant de couleur.
Des pendentifs en pierre et en émail ont pu rappeler quelques délicieux tableaux et certaines teintes d'émail faisaient songer à des reflets de lumière dans des paysages de Claude Monet ou de Sisley. Il y avait là une recherche de la
couleur, un goût pour l'éclat des pierres qui était très original à ce moment et qui heureusement devait se conserver sans qu'on ait pu cependant en tirer tout le parti qu'il pouvait fournir. Trop souvent les pierres employées étaient de qualité médiocre; elles n'étaient dans la composition du bijou qu'une valeur tonale le bijou était conçu en dehors d'elles et souvent sans elles.



C' est un diadème.

(suite) La seconde formule, ce qu'on a appelé techniquement le genre Cartier,réagissait heureusement contre cet emploi de pierres médiocres et rétablissait à leur place les pierres les plus belles par leur éclat et leur rareté, diamants, perles, rubis, émeraudes, saphirs. La réaction même ne conservait rien des formes qu'avaient
essayées les artistes de 1900 revenant nettement à la copie ou à l'imitation des
styles anciens, cherchait à adapter aux bijoux, tous les éléments décoratifs des époques Louis XIV ou Louis XVI 
qui pouvaient se reproduire en pierres précieuses. Les paniers fleuris des panneaux sculptés devenaient des 
pendentifs ou des broches; les postes courant  sur du velours ou dans les cheveux servaient de colliers ou de diadèmes, les balcons laissant le fer pour le platine se transformaient en plaques de cou ou en devant du corsage.





(suite) Il fallait lier ces deux techniques. On n'osait pas encore établir de rapports entre les couleurs des pierres précieuses et faire des  bijoux qui fussent uniquement fondés sur le charme ou l'éclat de ces rapports.
Paul Iribe avait montré dans ses dessins depuis quelques années ce sens fin et net de la société contemporaine.
L'album où il groupait les femmes en robes très simples, ou en manteaux amples et lourds, sous des foulards et des aigrettes, des bonnets de fourrure ou de légers turbans, autour de minces guéridons ou de commodes un peu grêles, ses dessins de Shéhérazade et tous ceux qu'il traçait d'une plume subtile et précise dans " le Témoin ", montraient en même temps que son goût pour la forme de la femme, son souci de ce qui pouvait servir à la mettre mieux en
valeur, vêtements, meubles et bijoux.Il ne la comprenait que parée avec une extrême recherche et dans le décor le plus vraiment luxueux dont ce qui pouvait servir à la mettre mieux en valeur, vêtements, meubles et bijoux.  



(Suite) Le bijou étant certainement ce qu'il y a au monde de plus luxueux, c'est par le bijou qu'Iribe devait commencer à faire oeuvre purement décorative.
Il fit quelques dessins de bijoux; il les montra à Sert, le peintre dont nous avons
publié dernièrement dans notre article le bel ensemble décoratif. Celui-ci mit en rapport Iribe et l'orfèvre Robert Linzeler, et les dessins furent ainsi réalisés.
Les bijoux ont été exposés récemment et comme encore on ne l'avait pas fait. Suspendus sur de longues tiges de métal, posés sur des turbans, devant des aigrettes, sur des coussins de soie, à l'angle de commodes, de guéridons, de consoles anciennes, entourés de tapisseries, de tableaux, devant des sièges
de damas ou de Beauvais, dans le décor habituel d'un très élégant salon, leur nouveauté n'avait rien de choquant, leur simplicité et leur recherche étaient en parfaite harmonie avec tous ces objets du XVIII ème siecle.



(suite)Du point de vue du goût, c'est à la fois quelque chose de très nouveau et de très traditionnel en effet, nouveau par l'arrangement des couleurs, le mélange du vert et du violet, l'émeraude et l'améthyste, le blanc mat des perles entourant l'éclat sourd de l'émeraude, par le choix des pierres de couleurs employées seules sans le secours du brillant, ce qu'on ne pouvait admettre dans un bijou de grand prix et vraiment somptueux; nouveau aussi par la disposition des pierres, perles suspendues à des fils de brillants, emploi de pierres calibrées non plus pour des entourages ou des lignes droites, mais pour un rayonnement
par exemple et comme un éclat prolongé d'une pierre dont on a voulu augmenter l'effet; nouveau surtout par le dessin, d'une si grande simplicité, si naturelle souvent qu'on s'étonne de n'y avoir pas soi-même songé. Rien n'est aussi simple que cette épingle de jabot, éclatement lumineux d'une  fusée, où les perles de grosseur inégale, très rondes et très belles, pendues à des lignes
très minces de brillants, tremblent comme de petits globes de feu qui vont s'éteindre dans la nuit. Et les lignes sont souples et pleines, les formes sont très bien proportionnées, sans maigreur et sans sécheresse, sans la pauvreté des dessins géométriques, losanges, cercles ou lignes droites où l'aversion des styles ou  du modem style conduisait trop de bons esprits. C'est aussi quelque chose de très traditionnel par le goût de la proportion, l'adaptation exacte à la robe actuelle, comme le grand devant de corsage du portrait de Tocqué ne se conçoit pas sans la robe de brocart de Marie Leczinska.


L' une des pages de l article

Du point de vue technique, c'est la mise en oeuvre des procédés les plus simples et les plus délicats. L'alliage du platine avec l'iridium permet de réaliser des montures d'une finesse extrême. Le serti dressé amincit encore la ligne de métal en donnant l'impression du tranchant d'un rasoir. Le joaillier a pu
accomplir ainsi ce qu'avait désiré le dessinateur et rendu à peine plus visible qu'un trait de plume le métal sertissant la pierre.


1911 revue Art et Décoration

(Suite) C'est donc bien une formule nouvelle que montre la conception de ces bijoux; tout y est sacrifié à la mise en valeur de la pierre précieuse. Elle y occupe toute la place. On tient compte de sa dimension d'abord, de sa forme, de sa couleur et de son éclat pour composer le bijou d'après ces éléments. 
La monture n'est plus que le soutien et la mise en place de ses qualités de volume et de tonalité. Elle comporte l'emploi exclusif du platine, métal terne et presque invisible. Un des bijoux les mieux venus en est un exemple frappant. 
Il  est constitué par une grosse émeraude gravée aux Indes; sa forme hexagonale et sa couleur verte sont soulignées par une ligne bleue de petits saphirs; les faces inférieures de l'hexagone, très longues, terminent le bijou, les faces supérieures, plus courtes, sont agrandies par quelques lignes de brillants, par des rayons de saphirs et de perles dont l'éclat bleu foncé et le blanc velouté
prolongent et complètent l'effet discret de l'émeraude.
On dira que c'est oriental, que ces lignes très simples et très minces ne 
conviennent qu'à des femmes comme en dessinait Beardley qu'on a si souvent nommé en parlant d'Iribe; en réalité il y a dans ces bijoux, une adaptation
tout à fait nouvelle d'éléments connus et cela prouve assez leur originalité qu'ils
puissent rappeler à des gens raisonnables des choses aussi différentes que les dessins d'un anglais contemporain et les miniatures persanes du XVII ème
siècle.
ROBERT CARSIX



1911 dessin satirique de Paul Iribe dans  "La Parisienne"




En 1911 dans Comoédia Illustré


On peut voir sur ce panneau de Paul Iribe , le dessin représentant  sa femme  Jeanne Dyris qui était une actrice de Théatre et plus tard de cinéma, la fameuse broche aigrette, le chapeau est  créé par Gabrielle Chanel.




Sur cette photo de 1912 toujours la broche aigrette  sur Jeanne(Jane) Dyris.  Ce fut une belle expérience du BIJOU, par Paul IribeRare tirage argentique d’époque d'une photographie de 1912 de Henri Manuel représentant l'épouse de Paul Iribe, l'actrice Jeanne Dirys posant dans une robe créée par Paul Iribe et réalisée par la maison Paquin pour la pièce La Rue de la Paix. Une version colorisée de cette photographie a été utilisée pour la double couverture de la revue Comoedia Illustrée consacrée à cette pièce. Jeanne Boiget qui adopte pour la scène le pseudonyme de Jeanne Dirys (Jane Dirys) épouse Paul Iribe le 19 avril 1911. Elle porte d'ailleurs sur cette photographie un bijou de corsage créé par Paul Iribe et qui apparait déjà sur la couverture du numéro de Comoedia Illustré du 1er mars 1911 (Diktats)

il semble qu il faudra attendre 1925 pour qu il retrouve son gout  de dessinateur en Joaillerie, ce sera pour les bijoux de Gabrielle Chanel




Dans le Comoédia Illustré, photo de Jeanne Iribe et de Henriette Roggers dans la pièce "Rue de la Paix" jouée au Vaudeville , Le décor et les robes sont dessinées par Paul Iribe.




1913 c'est une aquarelle de Paul Iribe qui sert de publicité pour le parfum "Près de vous"



1913 Comoédia



Claudine Seroussi  , chercheuse en joaillerie , vivant à Londres m'adresse cette photo d'un collier d'améthystes et de perle qui habille Denise Boulet qui fut la femme de Jean Poiret : Claudine Seroussi Bretagne (@artofthejewel)



1913 , ce serait un modèle de rose de Paul Iribe, ce qui fait que je me pose des questions sur l appropriation de cette rose par les revendeurs actuels



Est ce Poiret? ou Iribe?

"Il était aussi l'auteur de la griffe que portaient toutes les toilettes sorties des ateliers de l'avenue d'Antin. Sa nouveauté graphique, et la rose qui ponctuait la formule magique Paul Poiret à Paris, avaient fait sensation à l'époque" Edmonde Charles Roux



Cette robe est une élaboration de la construction plus simple des chemises de Poiret. Comme les versions précédentes,ce modèle a été conçu pour être porté avec une ceinture qui cintrait la robe au corps sous le buste dans une silhouette Empire. À la forme en T de base de la soie à motifs roses, Poiret a ajouté des rectangles de velours bleu noir pour former des manches larges et l'ourlet de la robe. Le résultat est l'illusion d'une sous-robe en soie et en velours. La proportion établie par cette stratégie de trompe-l'œil est cohérente avec celles des robes tuniques actuelles prônées par la créatrice à cette époque.
Paul Iribe a conçu le motif rose de Poiret. De toutes ses collaborations avec des artistes et illustrateurs, Poiret était le plus fier de son introduction d'Iribe auprès d'un public plus large. Iribe était responsable d'une publication au début de la carrière du designer, Les robes de Paul Poiret (1908), qui non seulement promouvait le couturier de plus en plus influent, mais établissait également Iribe comme un talent majeur. En 1908 ou 1909, lorsque Poiret déménage son entreprise sur l'avenue d'Antin, la rose, délimitée par Iribe, est placée sur l'étiquette du couturier, une réaffirmation de l'estime de Poiret pour l'artiste.


Mais peut-on pour autant indiquer que les motifs de ce bracelet sont inspirés de la rose d'Iribe?

 La maison d'enchères Art Valorem a revendu ce bracelet avec ce descriptif:  en métal chromé formée d'une alternance de maillons ornés de pâte de verre turquoise à "décor de roses dites d'Iribe" d'après Paul Iribe et de sections rectangulaires émaillées noires. Fermoir à cliquet dissimulé.





En 1914, Cocteau et Iribe fondèrent ensemble "le Mot", s'écartant ainsi du journalisme pur, pour lancer une formule encore peu exploitée, celle d'un journalisme de luxe où le dessin était roi. Ses deux ans d'apprentissage, vécus parmi les ouvriers typographes, avaient porté leurs fruits : Iribe était un technicien hors pair. Le Mot était d'une présentation qui faisait date. 
Un contretemps : la Grande Guerre. Elle ôtait au "Mot "toute chance de survie. Un an plus tard, il cessait de paraître. Mais pour Iribe le tournant était pris. Le luxe, le luxe sous toutes ses formes allait être son unique préoccupation, et cela en dépit du fait que, loin d'être l'âge d'or retrouvé, la paix en fut la négation. L'Europe des plaisirs était morte? Tout s'inscrivait en faux contre le Paris du Mot? N'importe : seul de son espèce, Iribe, qui n'aimait que la richesse, chercha son salut dans la négation des réalités de son temps.





Liquidation de la société  de Paul Iribe.

Paul Iribe et Cecil B de Mille

Après la guerre Paul Iribe alla s'installer à New York, il ouvrit un magasin de décoration, puis si j'en crois cette photo c'est en 1919 qu il fit la connaissance de Cecil B.de Mille dont il supervisera  huit films.

Photo de Jane Dyris

Paul Iribe avait divorcé de Jeanne Boiget dite Jane Dyris en 1918. 
En 1920 il épousa  Maybelle Hogan, une riche héritière qui avait déjà été mariée à Francis C Coppicus, directeur de théâtre et de musique. Ils ont eu deux enfants, Pablo (né en 1920) et Maybelle (né en 1928). Ils se sont séparés en 1928, en raison de l'implication de Iribe avec Coco Chanel.

Le style d'Iribe, sa compétence en de nombreux domaines – dessin, architecture, histoire du costume, du mobilier – ne pouvaient manquer de le séduire. Et jusqu'à ses défauts... C'étaient les défauts de De Mille. Il commença par confier au jeune Français l'étude de divers films, et plus particulièrement, décors et costumes de Man Slaughter dont il assurait lui-même la mise en scène. Leatrice Joy 21 , habillée par Iribe, fit une telle sensation qu'il fut aussitôt promu Directeur Artistique, ce qui plaça sous son autorité dessinateurs et décorateurs dont certains travaillaient pour Cecil B. De Mille depuis 1919. Or Iribe n'avait pas, comme De Mille, le talent de se rendre odieux sans que le dévouement de ses collaborateurs en fût affecté. On adorait De Mille. Tandis qu'Iribe... Ses empoignades avec Mitchell Leisen, portes claquées, cris, brouilles demeurèrent légendaires. On le trouve, en 1923, réalisant costumes et décors des Dix commandements. Leatrice Joy (actrice américaine surtout active à l'époque du cinéma muet.) tenait à nouveau la première place dans la distribution. Mais point de Mitchell Leisen qui, pour éviter d'être soumis à Iribe, avait refusé de collaborer au gigantesque spectacle.  Ed C Roux




1920

Nouvelle promotion en 1924, lorsqu'il s'improvisa metteur en scène de Changing husbands avec la bénédiction de De Mille. Seule Leatrice Joy échappa aux coups de la critique. « Amateurish »... déclara le New York Times. qui alla jusqu'à qualifier le film d'absurde.Aussitôt Cecil B. De Mille fit une tentative pour rattraper Mitchell Leisen. Il usa de toutes sortes d'arguments : il venait de se séparer de la Paramount; ce n'était pas le moment de lui refuser son aide d'autant que, cette fois, c'était lui le metteur en scène et non Iribe. Et puis le clou du spectacle allait être une catastrophe ferroviaire. Il fallait que le train se désintègre en quelques secondes. Qui, sinon Leisen, était capable d'un tel exploit? Leisen se laissa attendrir....



Paul Iribe quitta la Californie sans esprit de retour. Il était revenu à Paris où Maybell lui avait offert, rue du Faubourg-Saint-Honoré, un magasin à la façade duquel le nom de son mari brillait en lettres d'or sur fond de laque. Iribe retrouvait ses premières amours : les arts décoratifs. Aux meubles, aux tissus, aux tapis, aux bijoux, vinrent s'ajouter des décorations d'intérieurs. Il n'accepta de travailler que pour des personnalités en vue. 


Paul Iribe en Amérique en 1920 d'apres le journal Candide de 1924


Quand Paul Iribe arriva dans les Amériques, il n avait pas beaucoup d'argent dans sa poche.
Paul Iribe est ce dessinateur qui, bien avant les Russes, et par-dessus les Muni-chois, donna dans bien des journaux les modernes compositions qui, depuis, ont inspiré tant de couturiers, de peintres, de décorateurs, de bijoutiers.
Il publia même, avec M. Cocteau, un journal qui s'appelait Le Mot, et qui était joliment bien édité par M. Bernouard. Mais, las de voir les industriels et les marchands s'enrichir de ses dessins, il prit un transatlantique, ou, plus exactement, se fit prendre par lui. Et il arriva dans les Amériques avec très peu d'argent dans sa poche.
Il alla droit au Harper s bazar, un journal dont il avait vu quelques exemplaires dans le kiosque du Grand-Hôtel. Il dit au directeur :
— Je suis M. Paul Iribe.
— We don't care, lui fut-il répondu.
— Voyez alors mes dessins.
— Oh! mais vous êtes un élève de Irtoff Ert ?
Le jeune Irtoff Ert, depuis quelques années, copiait effrontément les dessins d'Iribe.
— Je suis..., répondit modestement Iribe. Et il accepta les 10 dollars qu'on lui offrit par dessin, à une époque où le dollar ne valait que cinq francs, ce qui faisait cinquante francs par dessin, c'est-à-dire le vingtième de ce qu'on le payait à Femina. Car il n'avait que très peu d'argent dans sa poche.
Un jour qu'il avait encore moins d'argent qu'à l'époque heureuse où, dessinateur de l'Assiette au Beurre, il demeurait rue De lambre et cherchait lui-même son lait chez la crémière, il entra dans un cinéma. Dans un cinéma parce que c'est bien moins cher qu'au théâtre. Et tout à coup, il reconnut, dans un film qui s'intitulait" Mâle"et femelle" la reconstitution d'une chambre à coucher qu'il avait composée naguère pour Mlle Spinelli.
Iribe bondit à la direction de la Famous Player Company.
— Vous avez, sans mon autorisation utilisé une de mes compositions, à tel numéro de votre film.
L homme qui a composé cette chambre est M. Urban. M. Urban est le premier décorateur de l'Amérique.
I dont' care. je suis moi paul Iribe Voici le journal qui, bien avant que vous ayez songé à mettre ce film en scène, publia la photographie de mon œuvre. M. Urban a tout simplement copié, calqué mes dessins. Votre premier décorateur d'Amérique est un calqueur.
Vous avez raison, monsieur Iribe, et nous ne pouvons mieux faire qu'en vous donnant la place de M. Urban.
C'est pour vous faire plaisir, car je n ai pas besoin de travailler, répondit le dessinateur qui n avait plus un penny dans sa poche.
Et il signa un contrat de 4.000 dollars par semaine, Cela se passait il y a quatre ans. Aujourd hui, en 1924 M. Paul Iribe en gagne cinq mille ce qui fait à peu près quatre-vingt mille francs par semaine.
C est tout, comme disait Balieff.




C'est ainsi que Spinelly, dont "l'atelier Martine" avait décoré l'antichambre et le salon, fit appel à lui pour sa chambre à coucher. Etre le décorateur de celle que Colette et un vaste public populaire appelait familièrement « Spi » ! Pouvait-il imaginer cliente mieux faite pour le comprendre ? en Spinelly la complice idéale. Là où je ne portais qu'un œil amateur de couleur et d'arabesque, Spinelly reconnaissait d'abord le but de parure et de consommation, l'incontestable nécessité du luxe 


Dans un article de Vogue en 1925, Robert Linzeler ecrit au sujet de la grande exposition.

Un des esprits les plus ouverts et les plus cultivés parmi les jeunes joailliers,
M. Raymond Templier, me disait, lejour de l'ouverture de l'Exposition des bijoux
« Quelle influence Paul Iribe aura eue sur l'art décoratif contemporain, et surtout sur la joaillerie! On ne le dit vraiment pas assez .
Rien n'est plus exact et nous pouvons, au début de cet article, noter le légitime hommage que commence à lui rendre sa génération.
Cette influence s'est exercée en deux sens. D'abord le sens de la dimension. Dans tous les dessins qu'il faisait et qui montraient des mains de femmes, les bagues n'étaient faites que de grosses pierres. Puis le sens décoratif
du bijou. Quand il commença d'en composer, qui devaient être vraiment réalisés, quand il fut en présence de ces matières, les plus somptueuses
et les plus éclatantes qui soient, il vit tout de suite le parti qu'il pouvait tirer de
l'assemblage et du mélange de leurs couleurs, par l'opposition des pierres opaques et des pierres transparentes, et il joua vraiment avec elles comme un peintre avec ses couleurs. Et encore très peu des dessins qu'il a faits ont pu
être exécutés, de sorte que le public n'a pas connu la nouveauté et la variété de cette création.
Mais je me rappelle l'enthousiasme que ces dessins et les quelques bijoux exécutés avaient soulevé chez les artistes: Anatole France, venu pour les voir avait passé une après-midi à les regarder, à les prendre dans ses mains...... 


Rare pendule de table en métal doré. Cadran circulaire à fond noir, chiffres arabes et aiguilles dorés. Monture à fins cylindres alignés en parallèle sur un socle rectangulaire débordant, évidé, au creux duquel se situe le bouton de réglage. Estampillé "PAUL IRIBE" sur la plinthe de face et à l'arrière du cadran et marqué "P. IRIBE & Cie" sur le mouvement d'horlogerie. La maison Millon qui l a revendue la date de 1925.


(Suite de l article de Linzeler).. sensibles, si bien accoutumées au contact des belles choses.
Mais qu'un artiste comme Iribe, ayant eu cette conception du bijou, ait souhaité la réaliser, il n'y a là rien d'étonnant. Il n'était arrêté ni par le prix, ni par les difficultés techniques, ni par des habitudes de clientèle. Il était d'ailleurs persuadé qu'aucun de ces éléments ne devait être un facteur d'insuccès, si ses bijoux plaisaient, car il pensait qu'ils répondaient à de nouveaux modes.
Mais que des joailliers, qui ont tous les risques que l'on connaît, n'aient pas hésité eux non plus à composer, à inspirer, à choisir ou à exécuter tant de bijoux magnifiques, non seulement d'une telle somptuosité, mais d'un tel art et d'un si grand goût pour la plupart, c'est un des efforts les plus étonnants et les
plus achevés de cette Exposition, qui en compte pourtant un si grand nombre.
Car ceux-là, qui ont des responsabilités financières considérables, n'ont pas craint de faire spécialement des bijoux répondant à une conception toute moderne avec plus d'audace encore peut-être que n'en témoignaient les bijoux composés par Iribe. 
Dans les Expositions d'autrefois, 1878, 1889, 1900, où les joailliers parisiens ont toujours témoigné à la fois de leur goût, de leur hardiesse et de leur capacité financière, ils employaient les pierres précieuses comme on les  taillait couramment. Leur risque, au cas où le bijou non vendu allait comme on dit " à la casse", ne portait que sur la "façon"  assez peu considérable dans ces temps heureux. A l'heure actuelle ce risque seul est décuplé et il faut y ajouter celui qu'engage la taille spéciale des pierres précieuses, pour qu'elles donnent leur
effet particulier dans la proportion.




Ce sont des études de bagues , cette page fait partie d un carnet de Iribe qui couvre la période de 1925 à 1930



Son petit livre , important qui fit date



1930

Cette bague à l'association de couleurs surprenants illustre parfaitement le style novateur de Paul Iribe, qui a été l'un des premiers artistes à utiliser le platine et l'iridium dans ses créations.



Une amie a essayé la bague a  la vente de Sotheby's


Il devint photographe, expérimenta de nouvelles techniques de publicité, mêla typographie et photographie, excella en photomontages, et à New York en 1931, se classa deuxième d'un concours de publicité qui groupait cinquante photographes européens de huit nations différentes. Iribe battait Hoyningen-Huyne de quelques longueurs, mais laissait loin derrière lui tout ce que l'Europe pouvait aligner de meilleur. Le baron Meyer et Man Ray n'eurent droit qu'à des mentions honorables. Tantôt il gagnait énormément d'argent, s'offrait d'abord une Voisin, dont les lanternes étaient d'argent et les coussins capitonnés de blanc, puis un voilier, la Belle de Mai, puis une maison à Saint-Tropez. A quelque temps de là, c'était la dèche et il vendait l'auto, le yacht puis le mas.....
Maybell se faisait démarcheuse et c'était elle qui décrochait les contrats. Ainsi reçut-elle une commande de bijoux chez Cartier et une autre... chez Chanel. Elle était résignée aux incartades d'Iribe, résignée à attendre. Il lui suffisait d'un télégramme : « Je ne peux pas revenir mais je t'aime » pour que de cet absent elle restât dupe. Entre quels bras dormait-il? Maybell croyait que c'était là une façon d'être homme typiquement française



En juin 1930 illustration pour sa revue "Choix"


Idem


Idem



C'est le 7 novembre 1932 que fut inaugurée une exposition comme on n'en avait encore jamais vue dans une demeure privée. Rien que des bijoux, dont pas un n'était à vendre. Ils étaient dessinés par Chanel. Cela était étrange qu'une femme qui n'était ni diamantaire ni joaillier s'avisât de rénover l'art de la parure et que ce fût à elle – qui s'était faite la championne des bijoux fantaisie, au point d'en exploiter la vente sur une large échelle – que se fût adressée la Ligue Internationale des Diamantaires. Enfin, qu'ayant, en plus d'une occasion, affirmé qu'à l'exception des perles seuls les bijoux de couleur étaient portables, Gabrielle n'en eût pas moins accepté de n'utiliser que la blancheur des diamants. Elle, des diamants? On conçoit l'étonnement de ses collaborateurs. Pas une femme, de quelque condition qu'elle fût, ne pouvait ignorer que les fausses perles étaient le dernier cri de la mode. Jusqu'aux entraîneuses qui s'y étaient mises, jusqu'à la Simone d 'Aurélien  dans les éclairages orange et bleu du Lulli's... Ed Charles Roux


Exposition Chanel




Toujours d'après Edmonde Charles Roux
Où voulait-elle en venir, en exigeant que l'on payât pour entrer chez elle? Il est vrai que le produit intégral des entrées allait être versé à l' Œuvre de l'allaitement maternel, présidée par la princesse de Poix, et à l 'Œuvre d'assistance à la classe moyenne, présidée par un membre de l'Académie française  . Chanel, dame quêteuse, Chanel dame d'œuvres... Et de quelles œuvres ! C'était à rire. L'idée de bienfaisance lui avait jusque-là été étrangère. Mais voilà qu'elle se rangeait dans le personnel de charité des classes dominantes. Que s'était-il passé? Personne ne s'y trompait. Il y avait là une atmosphère nouvelle. Les bustes endiamantés se multipliaient à l'infini dans des paravents de miroirs. Des lumières tenues très basses faisaient couler sur les pierreries d'étranges reflets. La rénovation des formes était éclatante.

Qu'est ce qui motive Melle Chanel? pourquoi ce subit engouement pour des bijoux diamants? Elle qui ne jurait que par le fantaisie. J ai mon idée, je l' exposerai plus après...




Paris Soir article de 1932

Le journal "Le Temps" écrivit ceci:
cette collection sobrement intitulée «Bijoux de diamants». Elle s’en est justifiée dans la presse, très simplement, en expliquant que pendant les périodes de crise, le diamant était un excellent investissement. «Si j’ai choisi le diamant, c’est parce qu’il représente la valeur la plus grande sous le plus petit volume.»L’époque n’était plus aux extravagances, la crise de 1929 avait eu raison de bon nombre de grandes fortunes. Les ventes de diamants étaient en souffrance et l’International Guild of Diamond eut cette idée géniale de se tourner vers Coco Chanel. La matière première lui fut fournie, bien entendu, et tous les frais de production et de publicité furent pris en charge. On estime la valeur de la collection à 93 millions de francs de l’époque.


Journal des débats politiques et Littéraires

... Ainsi, à l'en croire, son exposition de bijoux n'avait eu d'autre but que de faire connaître les artisans parisiens, qu'elle affirmait « être les meilleurs du monde  ». Elle ne voulait à aucun prix faire concurrence aux bijoutiers, oh non! Elle ne s'intéressait qu'aux artisans, que « le chômage rendait libres et sans joie », et à la joaillerie, « un art très français ». Allons, le luxe se mourait, le chômage menaçait. Qu'opposer à cela, sinon des diamants ? Tout lui devenait prétexte à assigner au luxe une fonction salvatrice. Il était clair qu'elle s'appropriait le langage d'Iribe. Ce fut à l'époque de cette exposition que sa liaison prit un tour officiel. Il s'installa, chez elle, au Faubourg. Cette présence à ses côtés, franchement avouée, effaçait la trace en elle de tant d'amours nouées au cours de sa vie, de tant de liens qu'il avait fallu taire. En 1933, après vingt-trois ans de silence, les kiosques de Paris affichèrent un revenant : le Témoin. Paul Iribe en était à la fois le directeur, l'éditorialiste et le principal illustrateur. Ses dessins n'avaient rien perdu de leur force. C'était toujours le même esprit corrosif, l'emploi impitoyable du noir, utilisé en vastes à-plats, le noir générateur de force, de beauté, le noir éloquent, voué à un crescendo continu. Aucune tendance au « décoratif », peu de concessions à « l'élégance », encore que sur le plan graphique le Témoin n'apportât rien qu'on n'eût déjà vu. Et puis tout se gâchait, et jusqu'à la puissance du trait, lorsque Iribe introduisait dans ses dessins deux couleurs, toujours les mêmes, qui, apposées sur les réserves blanches, apportaient l'inévitable note patriotique. C'était un rouge et un bleu drapeau... Dans les textes, le mot France revenait à chaque ligne. On ne sortait pas de ce thème. C'était l'affirmation majeure, le slogan unique, exalté jusqu'à l'absurde. Edmonde Charles Roux




Le grande réussite fut la présentation, les bijoux dessinés par Paul Iribe sont présentés sur des mannequins en cire, si surréels qu on les croirait humains!




En effet pour cette époque ce sont de très beaux bijoux, une débauche de diamants, presque royale. Une très belle plaquette de Draeger avec cinq photographies de Robert Bresson et un texte de Chanel , est produit pour l'exposition.


L' exposition représente quatre vingt treize millions de francs de l 'époque, 
Compte tenu de l'érosion monétaire due à l'inflation, le pouvoir d'achat de 93 000 000,00 Francs en 1932 est donc le même que celui de 6, 424, 990, 344.34 Euros en 2019.
Londres refusa une exposition en Angleterre à cause des dépôts de garantie exigés par les douanes britanniques.




On disait que ces bijoux étaient révolutionnaires! L histoire des bijoux est jalonnée de noeuds de ce genre
Coco Chanel déclara "Jadis le bijou c'était d'abord un dessin, mes bijoux représentent d'abord une idée...."  







C'était une excellente idée cette présentation sur des Mannequins de Cire


Mais n'oublions pas que Cartier l avait déjà fait en 1925


Cartier en 1925



Ceci n'est pas une coiffure, mais un collier qui a été présenté ainsi





On retrouve dans ce collier l 'étoile que Paul Iribe dessinait en 1930, mais dire qu il inventa le collier ouvert, c'est ignorer le modèle point d 'interrogation de Boucheron qui date de 1895!


Vue de l exposition

Alors pourquoi cette collection de Melle Chanel, j ai mon idée.
Paul Iribe avait fait un séjour aux Etats Unis,  et Claudine Seroussi Bretagne a bien voulu me donner cette précision:
" Il y avait aussi les bijoux qu'il a fait pour les films quand il a passé du temps à Hollywood. Je sais qu'il a fait des bijoux colorés pour « affaires de Anatol » de de Mille qui est ici. https://www.youtube.com/watch?v=HJhPvgyuXf4 . Je pense qu'il a fait des bijoux pour d' autres films à Hollywood, mais je ne suis pas sûr. il a travaillé sur 3 films avec Cecil B DeMille, puis il a dirigé 3 films et je pense qu'il est retourné à Paris. "

En 1931 avec deux ans de décalage, le crack de 1929 était retombé sur la France, il y eut des centaines de faillites, nos professionnels souffrirent énormément de la faillite du principal fournisseur de matières et banquier de nos métiers, pour ceux qui ne l auraient pas lu, mon article:

Plus rien ne se vendait  La Diamond Corporation Limited au travers de Paul Iribe et Coco Chanel, a voulu relancer le marché exangue du diamant, recreer un engouement pour les diamants, mais ce fut plutôt un coup d'épée dans le dos de la profession, . J avais des doutes mais ils se sont dissipés lorsque j ai lu l'excellent et très beau livre "Les plus beaux Bijoux de Femmes Joaillières" de Juliet Weir de la Rochefoucauld." 
J ai cherché si des maisons de joaillerie avaient encore ce document dans leurs archives et j ai trouvé.



Contenu de cette circulaire:

4 nov. I932
Affaire CHANEL
Nous apprenons par un article tendancieux et très maladroit paru dans  l'Intransigeant du 25 octobre 1952 que la maison Chanel fait  executer des bijoux en joaillerie et qu'elle organise une exposition pour le 5 nov.
La Chambre syndicale étant avertie, le president écrit à Mme Chanel et à l'Intransigeant.Nous apprenons que les bijoux auraient été faits par Lemeunier et Rudhart qui ont employé plus de I5 ouvriers chacun pendant plusieurs mois.
5 novembre
Réunion à la Chambre syndicale: M.M. Chaumet, Cartier, Van Cleef Mellerio, Mauboussin, Radius.
M. Paul Iribe, dessinateur, représentant de la maison Chanel expose la situation
Mme Chanel n'a aucunement l'idee de faire concurrence aux Joailliers; les négociants en diamants de Londres (Diamond Corporation Limited) auraient choisi Mme  Chanel pour faire une propagande en faveur du diamant et surtout avec l'idée de supplanter le bijou faux. Les pierres sont donc confiées, tous les frais de monture, publicité, etc; sont faits par Diamond Corporation Limited Mr Iribe a exécuté les dessins et s'est occupé de la fabrication. _
L'exposition est faite au profit d'oeuvres charitables présidées*par la Princesse de Poix, une Paul Dupuy, Maurice Donnay. Il y aura ensuite une exposition à Londres Patronnee par la marquise de Londonderry et une à Rome, sous le patronage de la Princesse Colonna. Après discussion nous remettons à M. Iribe une note demandant que les bijoux ne soient pas vendus, qu'ils soient démontés après les expositions sous le contrôle de la Chambre syndieale et que l'on indique aux visiteurs que les modèles peuvent être exécutés par leurs Joailliers attitrés. Dans ce cas une redevance pourrait être accordée à M. Iribe, représentant de la Diamond Corporation Limited. Nous demandons également une participation au produit de l'edposition, au profit des oeuvres de la Chambre syndicale.La Diamond Corporation Limited est l'ex De Beers Syndicate
4 novembre
On nous prévient que Mme Chanel n'accepte pas nos propositions; elle parait très irritée d'un article paru dans Candide d'hier et auquel la Chambre syndicale est etrangere.
5 novembre
Mlle Chanel devait faire les honneurs de son exposition au Pt de la Ch. Synd. accompagné de MM Langerock & Radius V.Pdts ces M.M. sont reçus par Iribe, Mlle Chanel s*excusant a cause de son état de santé.
9 Novembre
Rendez-vous avec le Pt de la Ch. Synd. Mr Radius & Mr Iribe.
Aucun fait nouveau, Mr Iribe prétend que plusieurs pièces auraient été achetées par certains de nos confrères (?} Il prépare une exposition àNew York et parait décide à passer outre aux demandes des joailliers
I2 novembre
Reunion a la Ch. Synd., rapport de Mr Georges Fouquet qui est adopté. Mr Arpels proteste contre l'assertion de Melle Chanel selon laquelle l plusieurs de ses bijoux auraient été achetés par VCA ce qui est absolument faux. A l'étude une série d'articles faits par des critiques d'art

A part l exposition de Londres qui n eut pas lieu comme je l expliquais plus haut .Je vous laisse le soin de lire et de relire cette page, c'est bien Paul Iribe qui négociera avec la chambre syndicale de la BJO et qui est le dessinateur des modèles Chanel.
Les maisons de Joaillerie se révoltèrent parce qu 'une "couturière"  avait été choisie par la La Diamond Corporation Limited  ils firent tout pour que la vente n'ait pas lieu et parait il??, exigèrent que les bijoux soient tous détruits à la fin de l exposition , 2   bijoux survécurent a cette exigence, ont ils été détruits? verrons nous reparaître l un d 'eux?



 Ainsi nous apprenons que les artisans fabricants sont parisiens 


Voici le poinçon de Lemeunier, cité dans la circulaire ci-dessus.


Et celui de Rudhart

Qu' ont ils fabriqué d'autre????je n'ai pas trouvé.

Il n'empêche que ces bijoux dessinés par Paul Iribe étaient de qualité , que la fabrication était excellente mais n' oublions pas qu'en 1932, avant et après nos grands joailliers firent fabriquer des merveilles qui n'étaient pas dépassées.



En 1933 dans son livret "Le Luxe"


En 1933, Iribe reçoit la Légion d’honneur pour son travail d’artiste-illustrateur.
Malheureusement...comme beaucoup d'autres, son dossier dans la base Léonore du ministère de la culture français  n'est pas publié....
La base Léonore comme la base des poinçons de Maître français est en panne depuis que le service a été confié aux douanes.




En tous cas la presse se fit l écho de cette nouvelle hâtive et fausse , mais ils ne se marièrent pas



Toujours satirique et pourtant!!


1934 Dessin de la Rose par Paul Iribe



Iribe était avec Coco Chanel, à sa villa, La Pausa, à Roquebrune Cap Martin  dans les alpes maritime, lorsque  21 Septembre en 1935, Iribe eut une crise cardiaque en jouant au  tennis avec Gabrielle Chanel . Il est décédé deux jours plus tard dans une clinique sans avoir repris connaissance  Coco Chanel fut  témoin de sa mort, et ressentit sa perte profondément. 





le 15-12-1935 dans la Revue des Lectures


1983 dans le journal "Pyrenées

Dans cet article j ai peu traité de la carrière en général de Paul Iribe , car j ai essayé de ne m' intéresser qu'au bijou, si vous avez des documents, des photos de bijoux de lui, je les publierai, en vous citant bien sûr.
Commentaires ci-dessous ou par mail : richard.jeanjacques@gmail.com


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