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jeudi 6 juin 2024

Souvenirs d'un diamantaire Michel BRULEY de 1965 à 2022:


Michel Bruley

Un jour  Françoise R . avait dit un jour à Michel Bruley négociant en diamants.

 « tu devrais nous raconter le négoce et ses relations avec la place Vendôme lorsque tu as commencé à travailler ? »

Michel Bruley était né dans l'Aube en 1933 et decedé à Fontenay-lès-Briis dans l'essonne le 22/10/2022


1965,

Dans ces années-là, il n’y avait, pratiquement, dans « le métier », que des Arméniens, des Juifs et des Jurassiens. Et moi !
Arméniens et Juifs, peuples ayant fui l’oppression, la haine, Jurassiens, peuple sédentaire, horloger puis tailleur de diamant l’hiver.

« société immobilière parisienne de la Perle et des Pierres Précieuses »Voir les annexes ci dessous

L’épicentre du négoce parisien se trouvait à la fois rue Cadet où il y avait 2 Clubs de diamantaires et dans des immeubles du trottoir Sud de la rue LaFayette, entre le numéro 8 et le numéro 74.
Pourquoi le trottoir Sud ? Pour bénéficier de la lumière froide du Nord et échapper ainsi aux rayons du soleil qui modifient la couleur des diamants.
La rue CADET était une petite rue parisienne, pleine de vie, aujourd’hui on dirait folklorique, avec ses marchandes de quatre saisons. Femmes souvent vêtues de noir, souvent grands-mères, elles offraient leurs marchandises sur des charrettes à bras. Marchandises qu’elles étaient allées chercher aux Halles potron minet.…….

Le négoce des diamants était très actif et très cloisonné.  Les deux clubs de la rue Cadet avaient de nombreux membres, dire mille n’est pas exagéré. Tous ces gens, courtiers, petits patrons, essentiellement des hommes, étaient les fourmis qui alimentaient le réseau des bijoutiers détaillants et des fabricants de France et de Navarre en diamants et pierres de couleur, surtout en diamants.

Et puis, il y avait les Maisons, les diamantaires, les marchands de pierres de couleur et quelques Maisons de perles de culture.
Voici des noms de cette époque et on se félicitera d’en trouver quelques-uns d’actuels …

TENENHAUS, RUBEL, LACROIX, BLOCH, SIRAKIAN, KOIRAN, ESCHWEGE …

A cette époque, TelAviv découvrait à peine le diamant, New-York, c’était l’Amérique et Bombay vendait encore les parures de ses Maharadjas. 
Tout le petit monde du négoce diamantaire parisien s’approvisionnait à ANVERS.
A  ANVERS, où l’on rencontrait les diamantaires du monde entier car ANVERS était CAPITALE MONDIALE DU DIAMANT, appellation officielle. 
Que l’on ne s’y trompe pas, cette appellation n’avait rien de folklorique, 
ANVERS était le centre du monde … du diamant ! Le parcours du diamant était, en gros, Afrique du Sud, brut à Londres, et taille à Anvers. 
Tous les diamants du monde, ou presque !

Les parisiens allaient à Anvers en train, avec un passeport car on allait à  l’étranger, en Belgique * 3. Le train s’appelait le « TEE », pour Trans Europe Express  *4. Dans un wagon de ce train il y avait un restaurant, un vrai restaurant avec des nappes blanches, de la vaisselle élégante, et une vraie cuisine avec de vrais cuisiniers exerçant leur talent dans le wagon d’à côté sur de vrais pianos à charbon. 
On quittait Paris dans l’après-midi, on arrivait très tard à ANTWERPEN, en pays flamand.

Le lendemain matin le parisien se rendait à la BOURSE du diamant sur Pelikaanstraat * 5. La bourse était noire de monde, et le restaurant, casher. 
Je vous précise cela car, aujourd’hui, à Anvers, signe des temps, il estplus facile de manger indien que de manger casher ! 
En ce temps-là, donc, le patron parisien arrivait généralement  accompagné de ce que l’on appelait un associé. Associé ou pas son rôle consistait à établir le contact avec les courtiers locaux, à leur faire déballer les bonnes affaires et à mener les négociations, en yiddish, évidemment.
Moi, gamin, je me souviens avoir assisté à des empoignades mémorables, entre messieurs BLOEMHOF, SCHNEEBALD, ROSENBLATT, DICKSTEIN.
Souvent pour des queues de cerises. Ce sont ces gens qui m’ont appris à regarder et à comprendre le diamant. 
A l’époque, pas de RAPAPORT, pas de GIA (1955) ni de HRD. 
Pas même de lampe à diamants. Seules les immenses fenêtres de la Bourse, ouvertes sur la lumière froide du Nord, éclairaient les diamants. On ne travaillait qu’avec la loupe et le petit carton blanc. Accessoirement, on utilisait aussi un flacon d’alcool où l’on trempait le diamant qui se recouvrait alors de petites bulles de liquide qui, faisant loupe, permettaient de voir encore mieux à l’intérieur de la pierre. Le petit carton blanc et l’humidité de l’haleine servaient à déterminer la couleur, approximativement.

On ne disait pas « D », « E » ou « F », on disait CRYSTAL, WESSELTON, CAPE. On disait LOUPE CLEAN, PIQUÉ.

Nous avions, en France, une expression fourretout que l’on utilisait pour la marchandise moyenne, on disait « BLANC COMMERCIAL ». Et là, on avait tout dit !

On achetait. 
La négociation se faisait en « Florins », Florin de bourse, monnaie fictive assise sur le Franc belge. Le paiement de tous les diamants du monde, s’effectuait donc en Francs belges. Le dollar américain n’est apparu dans nos échanges qu’au début des années 70. 
Et la marchandise arrivait à Paris. Ah, ne me demandez pas comment, disons que je ne m’en souviens plus. 
Oui, il faut dire que nous vivions encore avec les vieilles habitudes de la guerre. Moins on montrait, mieux cela allait. Et les relations du métier avec l’administration des Douanes étaient, disons, complexes. Genre chat et la souris !

La grosse plaisanterie d’alors consistait à dire que, contrairement à ce que certains pensaient, « T.V.A. » n’était pas l’acronyme d’une célèbrecompagnie d’aviation américaine (TWA) ! 
L’autre volet du négoce parisien c’était les marchands de pierres de couleur et les lapidaires. Avec, là encore, des Messieurs :

ROSENTHAL, GUERIN, NERSESSIAN, JOZ-ROLAND, GROSPIRON et d’autres que j’ai oubliés. 
L’approvisionnement de Paris en pierres de couleur était, vu d’aujourd’hui, assez folklorique.
Il y avait, essentiellement, ce que l’on appelait des « consignataires ». Le consignataire avait des correspondants en Inde, à Ceylan, en Birmanie, correspondants qui envoyaient, par la poste, des marchandises incroyablement variées.
Ces fournisseurs n’étaient jamais venus à Paris, n’étaient d’ailleurs jamais sortis de leur pays mais ils envoyaient des pierres par la Poste ! 
En effet, très peu de gens voyageaient à cette époque, alors les courtiers parisiens assuraient le dispatching, prenant des marchandises au 2ème étage d’un immeuble pour aller les vendre au 5ème !

Les courtiers parisiens, les gens des clubs de la rue Cadet, intervenaient donc pour distribuer les pierres de couleur entre les négociants, les  fabricants et les détaillants de toutes tailles.

Concernant les voyages, juste pour mémoire, je rappellerais que lorsque mon patron m’a envoyé pour la première fois à BKK, en 1976 je crois, il y avait au moins 4 escales. Parmi lesquelles Athènes, Tel Aviv, Téhéran, Karachi, Bombay …
Bien, nous avons donc accumulé des diamants et des pierres de couleur dans le négoce, qu’est-ce qu’on en fait maintenant ? Les maisons de négoce importantes, je travaillais dans l’une d’elles, avaient 4 débouchés principaux pour leurs marchandises, le négoce lui-même 
et les marchands étrangers, très nombreux à cette époque, les fabricants de bijoux, puis la province et, bien sûr Paris !
Les nombreux fabricants de Paris et les très nombreux fabricants de Lyon utilisaient, pour leurs collections de bijoux fabriqués en France, beaucoup de diamants et de pierres de couleurs.
Les marchands étrangers, venaient principalement d’Italie, d’Espagne, d’Angleterre, d’Allemagne, de Suisse.
Il y avait, à Paris, une très grosse activité européenne d’achat et de vente.
Par ailleurs, dans toutes les grandes villes de province il y avait quelques solides maisons de détail aux mains d’un homme, un personnage important dans la ville. Important du fait de sa relation particulière avec lesnotables argentés.

C’étaient, Monsieur PELLEGRIN à Marseille, Monsieur POUCHAIN à Arras, Monsieur Millau au Havre ,Monsieur BEAUMONT à Lyon, Monsieur DAGUZÉ à Nantes, etc, etc.

Ces gens vendaient leurs bijoux, soient créés par eux-mêmes en utilisant les pierres du négoce parisien et les artisans locaux, soit des bijoux prélevés dans les collections des très nombreux fabricants lyonnais et parisiens. Car, je le répète, les fabricants lyonnais et parisiens avaient des collections de bijoux français créés par eux-mêmes.

Et la place Vendôme dans tout ça ?

Là, je dois préciser car, en ce temps-là, on ne vous envoyait pas place Vendôme ou rue de la Paix avant que vous n’ayez au moins 4 ou 5 années 
de métier. 
Je parlerai donc plutôt de 1970 que de 1965. 
A l’époque, la rue de la Paix et la place Vendôme n’étaient pas le PONTE VECCHIO qu’elles sont aujourd’hui.  
Il y avait, pour autant que je me souvienne, sur le trottoir de droite en venant de l’Opéra, la Maison BRY, puis CARTIER, MELLERIO, MAPPIN & WEBB, et de l’autre côté, il y avait BOUCHERON, puis sur la place,  VCA, MAUBOUSSIN et enfin, CHAUMET. Ajoutez quelques Maisons de bijoux anciens et c’était tout.

En fait, en 1965, je n’aurais rien eu à faire place Vendôme, vous allez voir pourquoi.

En effet, les Maisons n’avaient pratiquement pas de relation directe avec le négoce, elles avaient leurs courtiers souvent attitrés, des gens indépendants qui faisaient la navette entre le négoce et leur client de la place Vendôme.

Pour CHAUMET, il y avait, par exemple et entre autres, une Dame MEYER, BOUCHERON utilisait les services de Mademoiselle WEISSBUCH, Les ARPELS recevaient Madame LANVIN. En tout, une grosse vingtaine de personnes servaient ainsi la rue la Paix et la place Vendôme.

Le courtier, la courtière, présentait la marchandise qu’il avait reçue d’un négociant. Si le client voulait l’acheter, quelques allers et retours entre la place et la rue LaFayette permettaient un marchandage de bon aloi, et, finalement, le négociant facturait directement à la Maison.

Le courtier recevait une commission de part et d’autre et apportait d’autres marchandises.
Toutes ces personnes, souvent rescapées des années 40, étaient très âgées.

Dans le même temps, les patrons du négoce rajeunissaient un peu, ce qui fait que, finalement, les courtiers disparaissant, les négociants, soit se déplacèrent eux-mêmes, soit envoyèrent des collaborateurs « faire » la rue de la Paix et la place Vendôme.

Mais, situons d’abord les personnages.
Car c’étaient de véritables personnages, les Messieurs de la place Vendôme. Il y avait une grande stabilité dans les entreprises tant au niveau des personnels que des entreprises elles-mêmes.
BOUCHERON était Mr BOUCHERON, CHAUMET était Mr CHAUMET et ainsi de suite.
Sauf chez CARTIER.

Je ne suis pas historien, aussi vais-je manquer de rigueur dans les dates.Néanmoins, je dirais que la famille Cartier a disparu de chez CARTIER entre 65 et 70. Confiée à un Monsieur CALMETTE qui avait été mis en place par les  familles CARTIER et CLAUDEL (les filles de Paul CLAUDEL) alors propriétaires de CARTIER.
La Maison est ensuite passée entre plusieurs mains dont celles,folkloriques, d’une bande d’individus propriétaires de boites de nuit en Floride ! 
La renaissance de CARTIER attendra la fin des années 70 avec l’arrivée, en provenance des briquets SILVER MATCH, de Monsieur Robert HOCQ et de son flamboyant Alain PERRIN qui deviendra Alain-Dominique plus tard

Dans l’immeuble suivant, les frères MELLERIO, Emile et Hubert, pas drôles-drôles mais visibles. 
A l’angle de la rue des Capucines, la succursale parisienne d’une vieille maison anglaise, MAPPIN&WEBB, qui fût, plus tard, aux mains d’un directeur dynamique, monsieur MOREAU.

En traversant la rue, on pouvait, très exceptionnellement, rencontrer Monsieur BOUCHERON, le père d’Alain, ensuite, Messieurs ARPELS, visibles mais de loin, ensuite les frères GOULET, dont l’un s’appelait MAUBOUSSIN, sur la brèche, au contact, enfin les frères CHAUMET, invisibles.

La règle, à cette époque, dans toutes les Maisons de la place, était que les gens du négoce n’étaient reçus que le matin, mais tous les matins.
Et c’est un peu CARTIER qui ouvrait le bal, lorsque, sur le coup de 11 heures, un garçon de bureau, monsieur PAULAS, débloquait, rue de la Paix une petite porte aujourd’hui disparue.

Chez CARTIER, donc, tout était parfaitement réglé. La porte étant ouverte, nous montions un petit escalier et nous nous installions, en rang d’oignons, sur des chaises prévues à cet effet. Au bout d’un moment apparaissait notre interlocuteur, qui fût longtemps monsieur 
GAUBE, Jean GAUDE DU GERS, pour être précis, sorte de gentleman désabusé, aimable et lent. Ce qui fait que, si l’on n’arrivait pas dans les premiers, on passait un long moment à attendre.

Parfois, une porte s’ouvrait sur le palier où nous attendions et apparaissait Mademoiselle Jeanne TOUSSAINT (1976) : « Bonjour Messieurs ». Garde à vous général : « Bonjour Mademoiselle ». 
Nous savions à qui nous avions à faire ! 
Certains d’entre nous allaient ensuite dans la « souricière » de MELLERIO, attendre, encore, pour être reçus par Monsieur HUBERT, comme je l’ai dit, pas drôle-drôle, mais compétent et, finalement, sympathique.

Je ne résiste pas à la tentation de vous raconter une anecdote avec monsieur Hubert.

Un jour où je lui étalais mes connaissances en gemmologie et notant, pour une fois, l’intérêt qu’il y portait, je lui offrais, en détaillant le mode d’emploi, un filtre CHELSEA.
A quelques temps de là monsieur HUBERT s’intéressa puis, finalement acheta, un lot de jolies petites émeraudes bien brillantes. Fier comme tout, je rapportais au bureau la bonne nouvelle. Au bureau où un message m’attendait. Je devais retourner chez MELLERIO, ce que je fis dans l’heure.

Sur le bureau de monsieur HUBERT il y avait mon lot d’émeraudes éparpillées et le filtre CHELSEA.
- Vous m’avez bien dit que les émeraudes deviennent rouges lorsqu’on les regarde sous votre filtre … 
- Absolument monsieur HUBERT, c’est une des façons de s’assurer que ce sont bien des émeraudes ! - Et bien regardez donc votre lot, il n’est pas rouge du tout, il est même plutôt gris !

Bon sang, il avait raison, les émeraudes étaient grises sous le filtre … Inquiet, très inquiet, je récupérais le lot d’émeraudes et filais directement au Laboratoire Français de Gemmologie où le directeur, monsieur Jean Paul POIROT, me reçut gentiment et immédiatement.
La preuve que j’avais encore des lacunes en gemmologie me fût administrée sur le champ !

Les émeraudes de Sibérie ne réagissent pas au filtre CHELSEA et restent inertes. Monsieur HUBERT, qui conserva le lot, et moi apprîmes quelque chose ce jour-là.

Chez BOUCHERON nous avions à faire à Monsieur Pierre ROBERT, le père de l’actuel Thierry. Monsieur ROBERT était un homme charmant, grand connaisseur des belles pierres, pas recroquevillé sur ses compétences et ses connaissances. J’apprenais lorsqu’il me montrait, lorsqu’il m’expliquait, son cahier d’écolier sur lequel étaient dessinées et répertoriées toutes les belles pierres qui lui passaient dans les mains.

Chez VAN CLEEF il y avait eu Monsieur Edmond MARENA, puis, plus tard, nous fûmes reçus par Monsieur Max PELLEGRIN. De vrais professionnels. Au loin, veillaient Messieurs ARPELS.

Chez MAUBOUSSIN, je l’ai dit, on voyait parfois les patrons eux-mêmes et surtout Jean GOULET-MAUBOUSSIN, le père d’Alain et de Patrick.
Accessoirement, Roger GOULET, frère de Jean, visiblement traité enportion congrue …

Chez CHAUMET, je n’ai pas une grosse expérience mais, néanmoins, j’ai bien connu Monsieur MATHIEU … L’affable Monsieur MATHIEU qui regardait toujours avec attention ce qu’on lui montrait, mais sans donner beaucoup de suite à nos entretiens …

Un peu plus loin, rue Royale, il y avait un autre « Monsieur », Monsieur FRED, le merveilleux Fred SAMUEL. Je précise parce qu’il y a parfois, comme ça, des gens qui ont traversé votre vie en laissant une trace différente.  
Des gens qui vous ont aidé à grandir. C’était le cas de Monsieur FRED. Beaucoup d’années plus tard, dans une mondanité, je restais longtemps assis avec Monsieur FRED dans un petit salon à l’écart. Et alors que j’avais repris contact avec la foule, un confrère, plus jeune que moi, me dit, presque sur un ton de reproche : « Mais, qu’est-ce que tu fabriquais avec ce vieux bonhomme ? » Je lui répondis seulement : « C’était Monsieur FRED et je lui rendais un peu de qu’il m’a donné ! »

Nous visitions également la Maison BOIVIN, avenue de l’Opéra, qui, sous la direction de monsieur GIRARD et dans l’aura de ses créations passées renaissait avec les dessins de Caroline de BROSSES.

Que des hommes me direz-vous ! Il y avait également une Dame, place de la Trinité. Madame Suzanne BELPERRON, dont je me demandais pourquoi son magnifique vison était à l’intérieur de son imperméable !

Chaque Maison ignorait superbement les autres. On ne prononçait pas le mot « CARTIER » chez BOUCHERON, le mot « CHAUMET » chez VCA !

Mais, revenons-en à notre petit commerce. De Maison en Maison nous allions proposer nos pierres, quasiment tous les jours, comme je l’ai dit. 
A cette époque, nous sommes donc au-delà de 1970, la pratique la plus courante était que les joaillers de la rue de la Paix et de la place Vendôme achetaient des pierres et demandaient ensuite à leurs créateurs de les enrichir d’une monture. 
Pour nous différencier clairement d’aujourd’hui, au risque de heurter les gens du marketing, je dirais que le principal critère de sélection pour les pierres d’alors était « le charme ».

De toute façon, il n’y avait pas de certificat, donc rien à lire pour se donner des certitudes, simplement prendre la ou les pierres dans la main, pour s’éblouir des feux du diamant, s’émerveiller d’un rouge, plonger dans le bleu, ou bien sourire au vert tendre des émeraudes. 
L’inclusion, la soie, n’avaient pas à disparaitre mais seulement se faire discrètes et elles devenaient alors acceptables, elles étaient plus considérées comme des signatures que comme des défauts. 
Je vous propose une expérience. Vous achetez aujourd’hui, dans une vente publique, un très bel objet, bracelet ou collier ancien, bien coloré. Diamants, pierres de couleur et portant une belle signature.
Soyons fous, vous dépensez $.500 000. 
Une fois chez vous, vous démontez toutes les pierres, diamants, rubis, émeraudes et saphirs.

Le lendemain, vous faites le tour des Maisons avec toutes vos pierres. 
Et bien, pas une des Maisons de la place ne vous achètera la moindre de ces pierres ! Pas même les diamants.
Etrange, non ? Parce que vous avez tout de même dépensé $.500 000. Peut-être même n’avez-vous pas pu acquérir l’objet contre un acheteur trop fort, qui ne serait que la Maison dont le bracelet porte la signature. Pour son musée.

Etrange, non ? Cela m’amène à poser une question : Comment en sommes-nous arrivés aujourd’hui à cette folie qui veut que des pierres naturelles, des cristaux nés au coeur de la terre, soient exempts de toute trace de leur vie antérieure, soient exempts de toute trace des évènements qui ont accompagné leur naissance ?

Moi, j’ai une petite idée. En fait, il y a surement plusieurs raisons. 
Dans les années 75/80, hormis la folie du « diamant-placement » dont je parlerai tout à l’heure, est apparue une clientèle nouvelle et très gourmande. 
Je me souviens de la queue des Japonais devant chez CARTIER …Pas plus de 10 briquets par personne ! 
Exactement la même effervescence que devant LV, aux Champs Elysées aujourd’hui, où, parait-il, on vous accoste pour vous demander d’acheter en nombre, tel ou tel objet à l’intérieur …
Mais nos Japonais n’achetaient pas que des briquets.  Dans la culture bijou du Japon il n’y avait pas de pierres précieuses. Aussi les Japonais, nouveaux voyageurs, se ruèrent-ils sur le diamant. La plus prestigieuse, sans doute, mais aussi la plus facile à comprendre des pierres précieuses.

Tant qu’il s’est agi de petites pierres on les vendait avec leur seule facture, mais les pierres plus importantes durent être accompagnées de certificats de gemmologie. En France les certificats existaient depuis bien longtemps, depuis 1929 exactement puisque nous avons le plus vieux laboratoire de gemmologie du monde, fondé en 1929 par le Syndicat des Diamantaires. Il s’agissait, à l’origine, de trier le vrai du faux et de séparer perles et perles de culture ! 
Dans les années 75/80, il existait deux types de certificats pour le diamant en France. 
On peut, aujourd’hui, les trouver un peu « folkloriques », jugez-en : Il y avait un certificat « PUR 3fois » qui garantissait une pureté relative au grossissement 6 fois et un certificat « PUR 8fois » qui garantissait une pureté relative au grossissement 10 fois !

On ne parlait pas de la couleur du diamant, au moins en France. Pour les pierres de couleur, il s’agissait bien sûr de donner le nom de la pierre présentée au laboratoire mais surtout de faire la part du vrai et du faux. 
Mais revenons à nos Japonais. Ce fût une vraie grosse clientèle qui commença donc par acheter des diamants et des briquets. Puis, ensuite, naturellement, des pierres de couleur. Et c’est là que les choses se gâtèrent. Car ils voulurent des pierres sans défaut visible, comme le diamant.

Ça vaut ce que ça vaut mais je suis sûr que ce fût un commencement. Dans le même temps, des pierres de couleur « nouvelles » apparurent sur le marché. Des pierres plus « propres », plus « brillantes ». Je me souviens parfaitement de saphirs d’un beau bleu sombre, exempts de soies, qui se faisaient appeler « nouveaux saphirs de Ceylan ».
Je me souviens aussi que nous étions très fiers, ici, à Paris de vendre parfois des vieux saphirs soyeux, culassés, à des gens de BKK qui commençaient à voyager…

A la fin des années 70, le laboratoire suisse GÛBELIN constata que  certaines inclusions présentaient un aspect différent de celui qu’on leurconnaissait habituellement. Cela se traduisit d’abord par l’introduction 
d’une nuance dans l’énoncé de l’origine géographique de la pierre. 
Pour faire court, « ORIGIN CEYLAN » devint « IN OUR OPINION ORIGIN CEYLAN ».

Le marché finit par faire la différence jusqu’à ce qu’il apparut clairement, dans le courant des années 80 que la couleur de certaines pierres se trouvait modifiée en même temps que les inclusions. Finalement on parla de pierres chauffées et de pierres non-chauffées.
J’ai une illustration de ce propos :
En 1991, le tribunal me confia une expertise qui mit entre mes mains un important collier composé d’un ensemble de rubis entourés de diamants, collier fabriqué à NYC en 1985, signé d’une grande Maison. Comme cette affaire judicaire trouvait son origine dans l’apparition de pierres chauffées lors de l’examen au LFG avant la vente publique de l’objet à Paris (1991), je demandais au joaillier américain de me communiquer tous les documents ayant accompagné la fabrication du collier.

Et là, je constatais que, en 1985, le joaillier avait collecté un ensemble de rubis sur la place de NY et avait composé, en toute ignorance, son collier avec, à la fois, des rubis chauffés et d’autres, pas chauffés. 
Cela aurait pu et a même dû se produire dans n’importe quelle Maison, évidemment.

Notre étonnement ne s’arrête pas là. En effet, les prix payés, je vous le rappelle, en 1985, par le joaillier, se tenaient pour toutes ces pierres 
identiques, mais certaines pierres chauffées avaient été payées plus chères que d’autres non chauffées !
Bon, je ne peux pas arriver au bout de mon propos sans dire quelques mots de deux périodes qui chevauchent celles que nous venons de survoler et qui marquèrent profondément nos activités.
1975, 75/76, on va dire. Le franc fiche le camp, inflation officielle 13%, ce qui veut dire souvent plus de 15 dans le panier de la ménagère. La Bourse ne rassure personne. Les banquiers n’offrent rien sur rien.
L’inflation … Il faut trouver quelque chose !
Ce sont les banquiers qui réfléchissent et qui trouvent ! 
Certains, en effet, découvrent que le diamant, produit naturel rare, socialement incontournable, résiste plutôt bien à l’inflation, voire, s’en joue carrément. 
Alors, pourquoi ne pas acheter aujourd’hui un diamant, le mettre dans un coffre, attendre que l’inflation érode consciencieusement la monnaie durant quelques années et ensuite réinjecter ledit diamant dans le circuit auquel il est destiné …la joaillerie.

Pratiquement toutes les banques ouvrirent, au moins en France, des officines spécialisées pour aider leurs clients en lutte contre l’inflation. Le discours était parfaitement rodé. La hausse régulière, du prix du diamant, sa rareté réelle, la quantité finie de diamants existant sur terre, son besoin de consommation sociale allant croissant, le diamant était une valeur sure.
Il me faut, pour dédouaner tout le monde, sauf les voyous, rappeler que la période était telle que tout est parti dans tous les sens. Les officines issues des banques, dans un esprit de diversité, vendirent, des forêts, des morceaux de forêts, des wagons, des morceaux de wagons, des oeuvres d’art, des morceaux d’oeuvres d’art etc, etc … Et tentèrent même de 
vendre des morceaux de diamants ! … ?

Prévert était largement dépassé ! Nous courrions dans tous les sens pour trouver ces fameux diamants. 
NYC, Tel-Aviv, Anvers et même Amsterdam où j’avais trouvé un filon. Pour vous faire l’histoire très courte, le problème vint de ce que le nombre de diamants vendus comme placement devint tel qu’il devenait illusoire de pouvoir un jour les réinjecter dans le circuit normal, celui de la joaillerie.
Alors la baudruche se dégonfla d’elle-même. Parti en 1975 de quelques milliers de dollars, le diamant de 1 carat atteignit 65 000 dollars en 1982. Puis, presque du jour au lendemain, il devint invendable et sa valeur se retrouva à quelques milliers de dollars. 
Le sort des wagons ne fût pas meilleur car on avait souvent oublié d’intégrer dans les calculs le vieillissement accéléré du matériel … 
Inutile de vous dire que tous les investisseurs en diamants s’en sortirent plutôt mal.

Pour ce qui concerne l’activité « placement » que nous avons menée en pierres de couleur il y eut certainement moins de gens déçus. D’abord parce qu’il y eut peu d’opérations placement en pierres de couleurs, les banquiers ne « comprenant » pas le produit par rapport au diamant où ils pensaient que la lecture du certificat les renseignait, les protégeait 
suffisamment, ensuite parce que certains achats de très belles pierres de couleur se révélèrent un … excellent placement !

Une anecdote ? 
Notre banquier habituel décroche un rendez-vous avec un client très important. 
Je suis convoqué pour le briefing. Apparemment le sujet a déjà été débattu avec le client, c’est d’autant plus normal qu’un investissement en diamant a déjà été réalisé.

Frileux, le banquier me donne rendez-vous dans une brasserie quasiment une heure avant le rendez-vous. On ne s’attable pas, cela pourrait être trop long. 
Comptoir, sandwich, bière. Imaginez la scène. Ces deux types au comptoir, quoi de plus banal ? Sauf que. Dans la poche gauche de ma veste j’ai un diamant parfait de 5 carats.
C’était la préconisation de la banque. Dans la poche droite de ma veste j’ai un exceptionnel saphir cabochon, le genre que l’on rencontre tous les 15 ans !
Diamant et saphir ont une valeur quasi identique.

Il ne faut pas une heure pour manger un sandwich. Aussi utilisais-je le temps du café pour expliquer au banquier que je me permettrais bien une suggestion. Le client ayant déjà des diamants, il serait judicieux de diversifier … et je raconte ce que j’ai dans les poches.

Je vais faire court. D’ailleurs la réponse fût courte : NIET !L’important client a donc acheté, fin 70, début 80 un magnifique diamant de 5 carats. J’espère que, depuis, il n’a pas cherché à le vendre. L’autre période, plus folklorique, dont je veux vous parler, qui s’étend à peu près de 86/88 à 1995 est celle où est apparu un client exceptionnel. Et quand je dis exceptionnel je ne me paye pas de mots. 
Ce client a mis la place de Paris en ébullition durant plusieurs années. 
Au début de l’apparition de ce client on disait « Sultan de Brunei », il s’est avéré qu’il s’agissait d’un frère du Sultan que l’on a appelé « Jeffrey ». 
La manne est, en fait, principalement tombée sur la Maison MAUBOUSSIN d’alors car je crois que c’est un membre de son équipe qui avait déniché l’oiseau rare.
L’homme s’est particulièrement bien entendu avec Patrick MAUBOUSSIN.

Ce client a dépensé des dizaines et des dizaines de millions de dollars. Il y avait des périodes où tous les grands ateliers (il y en avait plus que maintenant) où tous les grands ateliers travaillaient pour lui. 
Il a fait faire beaucoup de joaillerie mais aussi beaucoup d’objets parfois très importants qui allaient de la reproduction d’un tableau de Van Gogh à une scène érotique animée. Toujours, métaux précieux, pierres précieuses.

Patrick MAUBOUSSIN avait établi des relations exceptionnelles avec le personnage au point que le prince lui confia la réalisation de son palais dans l’immeuble IBM, à l’entrée Sud de la place Vendôme.
Je me souviens, un jour, Jeffrey avait annoncé son passage à Paris pour le WE. 
Branle-bas de combat, chez MAUBOUSSIN, mais également chez les autres joailliers où le prince ne dédaignait pas de se montrer parfois. 
Le Lundi suivant, ma tournée me conduisant place Vendôme, je posais la question indiscrète chez MAUBOUSSIN :

« Alors, il vous a encore dévalisés ? » 
- Non, il n’a rien voulu voir cette fois…. Enfin, il a tout de même commandé un porte clé !
- Un porte clé, répétais-je, incrédule !
- Oui, tu veux le voir ? 
Sans attendre la réponse mon interlocuteur sorti de la pièce pour revenir avec un projet de porte-clés. Un anneau, une chaine et au bout de la chaine, un diamant coussin d’une trentaine de carats.
Avant de vous quitter laissez-moi attirer votre attention sur le déroulement du temps……
Je viens de vous parler de la vie il y a cinquante ans … 
Il y a cinquante ans il n’y avait certes pas internet, pas de téléphone portable, pratiquement pas de chômage, et 20 000 morts par an sur les routes de France.
Mais il y avait eau, gaz, électricité à tous les étages. On traversait l’Atlantique en avion à réaction, presque tout le monde avait sa petite auto, on partait à peu près 1 mois en vacances. Ce qui fait que si je vous transportais en 1965, vous pourriez vivre sans changer beaucoup de vos habitudes. Et l’homme de 1965 serait certes surpris par bon nombre de 
choses d’aujourd’hui mais il pourrait, sans trop modifier ses habitudes, vivre en 2015.

Maintenant, faites un nouveau bond de 50 ans en arrière … 1965 -1915. 
L’individu de 1965 aurait certainement beaucoup de mal à vivre en 1915 !

Conférence de Michel Bruley au laboratoire français de gemmologie : https://www.laboratoire-francais-gemmologie.fr/

A N N E X E S 

« société immobilière parisienne de la Perle et des Pierres Précieuses »

Dans les années 1920, on assiste à une arrivée massive de juifs ashkénazes et d’arméniens dans le faubourg Montmartre. Les premiers fuient les pogroms en Europe centrale et en Russie, les seconds le génocide perpétré contre eux par l’Empire ottoman de 1915 à 1923. Plusieurs synagogues sont toujours présentes dans le quartier comme la synagogue de la rue Buffault ou celle de la rue Cadet.
Construit en 1926, l’immeuble Art déco de la rue Cadet abrite alors la « société immobilière parisienne de la Perle et des Pierres Précieuses » (le nom est gravé sur la façade) : c’est en fait la bourse des diamantaires où s’échangent et se négocient les diamants bruts.


Transactions dans les années 30




*3-26 mars 1995 – Mise en place de la libre circulation dans 7 pays. L'accord de Schengen prend effet dans 7 pays: la Belgique, la France, l'Allemagne, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et l'Espagne. Les voyageurs peuvent se déplacer dans l'ensemble de ces pays sans contrôle des passeports aux frontières.

*4-Les Trans-Europ-Express (TEE) étaient des trains de voyageurs européens de prestige, rapides et exclusivement de 1re classe. Mis en service à partir du 2 juin 1957, ils ont peu à peu disparu à partir du milieu des années 1980, au profit de nouveaux trains InterCity (IC), EuroCity (EC) et des trains à grande vitesse.

* 5- Pelikaanstraat (rue Pelikan) et quartier des diamantaires, Anvers
Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, la Pelikaanstraat (rue Pelikan) est un centre commercial de diamants de renommée mondiale. La rue est également intéressante de par son architecture, dominée par des bâtiments pittoresques de style Art nouveau et éclectique.

Anvers est un centre du commerce du diamant depuis le XVe siècle. L'industrie a été transformée lorsque Lodewyk van Berken a inventé une nouvelle forme d'outil de polissage du diamant, le scaif, qui a permis la création du diamant stéréotypé étincelant et aux multiples facettes. Cela a attiré des commandes de la noblesse européenne et a attiré d'autres artisans à Anvers. Charles le Téméraire lui confia la tâche de tailler et de polir le diamant florentin. Dans les années 1890, une industrie du diamant a été créée à Anvers par des familles de commerçants et de fabricants de diamants venus d'Amsterdam. Le


Le quartier est dominé par des marchands juifs, indiens jaïns, maronites, chrétiens libanais et arméniens, connus sous le nom de diamantaires. Plus de 80 % de la population juive d'Anvers travaille dans le commerce du diamant ; Le yiddish était, historiquement, la langue principale de la bourse du diamant. Aucune activité n'est effectuée le samedi.

Le quartier des diamantaires est situé à côté de la gare centrale (Antwerp Centraal) et à quelques minutes à pied du Meir, la principale rue commerçante d'Anvers. Il existe de nombreux restaurants, bars et cafés variés dans le quartier.
Image gracieuseté de Wikimedia et Vasyatka1.




vendredi 10 août 2018

Quand Alexandre DUMAS s'interessait aux diamants

En 1868 Claude Framinet inventa le "Diamant américain" il partait d un "Quartz" pur et écrivait

"Le Diamant américain a tué le Diamant vrai. il réunit toutes les qualités du Diamant le plus authentique; l'œuvre du chimiste ne diffère en rien de l'œuvre de la nature. Extrait des roches californiennes, le Quartz, qui est la base du Diamant américain, ne présente à la vue, avant d'être traité par le procédé Framinet, qu'une agglomération de cristaux rugueux, incolores et sans transparence, entourés d'une croûte pierreuse. "
Claude Framinet écrivit un livre et demanda a Alexandre Dumas de le préfacer, c'est son texte que je recopie en italique  et vous présente (mes commentaires en Bleu)



Alexandre Dumas père

Vous vous rappelez peut-être qu'à propos de la mer, j'ai eu avec vous une causerie sur les perles.
Et, en effet, les perles sont les vraies filles de la mer ; les huîtres ne sont que les nourrices des perles.
Or, de perle à diamant il n'y a que la main. Une occasion se présente pour moi de vous parler des diamants ; laissez-moi vous parler de ce tyran de la mode, qui seul a le droit d'opprimer la perle.
Je voudrais vous faire l'histoire des quatre ou cinq diamants fameux, qui ont attiré les regards du monde entier et qui ont fait le désespoir des voleurs, attendu que, comme les raisins de la fable enfermés qu'ils sont dans les trésors royaux, ils étaient trop verts pour eux.
Je désire vous faire cette causerie d'autant plus étendue, que c'est presque le testament du diamant. que je vous envoie.
Tout le monde sait, depuis les expériences des chimistes du 18e siècle , et surtout depuis celles du célèbre Lavoisier, tout le monde sait, disons-nous, que le diamant n'est que du carbone cristallisé.
Ces Christophe Colomb de la science ont découvert que le diamant, exposé aux feux des fours de porcelaine, disparaissait sans laisser de traces ; il se volatilise de la même façon en l'exposant au feu de la lentille de Tschirnhausen.




En 1682, le savant saxon Ehrenfried Walther von Tschirnhaus (1651-1708) devient le premier Allemand à être admis à l’Académie royale des sciences. D’abord connu comme mathématicien, Tschirnhaus se fait un nom par ses expériences sur les miroirs et lentilles ardentes de très grande taille ainsi que par la fabrication de lentilles de verre. Ses travaux aboutiront à l’invention de la recette de la porcelaine européenne. Ses miroirs et lentilles ardentes se feront une place dans les laboratoires et les cours de toute l’Europe. Le duc d’Orléans et Lavoisier s’en serviront.

Ces expériences commencèrent par ruiner Lavoisier et plus tard furent cause de sa mort. Ruiné comme chimiste, il voulut refaire sa fortune comme fermier général, et ce fut comme fermier général qu'il eut la tête tranchée avec vingt-sept autres fermiers généraux.
Il y a dans le monde cinq ou six gros diamants. Chacun de ces diamants a l'histoire de son origine plus ou moins pittoresque. Mais avant d'entreprendre cette généalogie, il faut que nous prévenions le lecteur que le prix des diamants varie selon la forme, le degré de transparence, la pureté et la grosseur de la pierre.
La transparence du diamant doit être égale à celle de l'eau; quand on dit : un diamant d'une belle eau, on veut dire un diamant d'une limpidité parfaite.
Inutile de dire que les diamants deviennent plus rares et plus chers au fur et à mesure qu'ils augmentent de grosseur.
Ainsi, supposez un diamant de belle eau, estimé 1,000 €. ; un autre, aussi parfait, ne coûtera pas, s'il est dix fois plus gros, 10,000 €, comme il serait logique de le croire.
C'est qu'en matière de pierre précieuse, un diamant dont le diamètre est le double d'un autre doit coûter soixante-quatre fois autant ; s'il est triple, sept cent vingt-neuf fois, et, s'il est quadruple, quatre mille quatre- vingt-seize fois.

De nos jours comment calculer le prix d un diamant? le rapaport:
http://www.diamants-infos.com/taille/calcul-prix.html

Le plus gros diamant qui existe est, sans contredit, celui de l'empereur du Brésil; il pèse 1,730 carats; il vaudrait un prix inestimable, 1 milliard peut-être, s'il n'était atteint de quelques défauts qui affaiblissent son éclat et qui l'ont même fait traiter de topaze blanche par quelques lapidaires de mauvaise humeur.
Après le diamant de l'empereur du Brésil, vient immédiatement celui du grand Mogol; il pèse 279 carats, 

Le grand Mogol est un diamant  aujourd'hui disparu. Il faisait partie du trésor de l'empire Moghol, comme le Trône du Paon et le diamant Koh-i-noor  Ce diamant bleu clair serait, avec 280 carats le cinquième plus gros diamant historiquement connu.

Aujourd'hui que la reine d'Angleterre, à qui il appartient, l'a fait tailler. Avant d'être taillé, il pesait un tiers de plus; on l'appelle Kohinoor, en langue hindoue, ou Montagne de lumière.



Petite erreur de Alexandre Dumas Père:Le Koh-i Nor ou Kuh-e Nûr ou Koh-i-Noor (en Persan : کوه نور, montagne de lumière) est un diamant de 105,602 carats soit(21,61 g) car il a été retaillé actuellement monté sur la couronne de la famille royale Britannique

L'ouvrier mineur qui le trouva comprit, en le voyant rouler à ses pieds, qu'il y avait là la fortune d'un prince ; mais, comme en sortant des mines, les ouvriers sont, comme les forçats, fouillés jusqu'aux endroits les plus secrets, celui-ci se fit d'un coup de hache une blessure longitudinale à la cuisse, y cacha le diamant, banda sa cuisse avec son mouchoir, et grâce à cette blessure grave et au sang dont il était couvert, sortit de la mine sans être visité.
La Montagne de lumière fut vendue 100,000 francs d'abord, puis elle passa de main en main, s'augmentant toujours, jusqu'à ce qu'elle s'arrêtât dans celles du grand Mogol, qui la paya un peu plus de deux millions.
Celui qui vient après, et qui même aurait peut-être le droit de venir avant, fut apporté en Europe par un soldat français en garnison à Pondichéry.


 Photographie de Elkan Wijnberg

On appelle ce diamant l'Orloff et il appartint à la couronne de Russie. 
L'Orlov (quelquefois écrit Orloff) est un grand diamant dont la forme et les proportions sont celles de la moitié d'un œuf de poule. Cette pierre a été volée au xviie siècle à Mysore dans un temple Hindou en Inde du sud, puis achetée par Grigori Orlov pour l'offrir à Catherine II de Russie. Le diamant est maintenant exposé à la fondation du diamant au Kremlin, où il orne le Sceptre Impérial.


Le régent

Le Régent, ainsi nommé parce qu'il fut acheté par le duc d'Orléans à l'époque de sa régence, pèse cent trente sept carats, 

Le Régent est un diamant blanc découvert en 1698 à golconde  en Inde du Sud. Il tient son nom du régent Philippe d'Orleans l'un de ses premiers acquéreurs. Une des pierres précieuses les plus remarquables parmi les joyaux de la couronne de France  considéré comme le diamant le plus pur et le plus beau du monde, arboré entre autres par le roi Louis XV, la reine Marie Antoinette et l'empereur Napoleon Ier il est conservé depuis 1887 au Musée du Louvre.(wikipédia)



Reste le Sancy.



Le Sancy était une des trois pierres précieuses que Charles le Téméraire portait sur son casque à la bataille de Nancy ; les deux autres étaient un rubis et une émeraude.
Un coup de masse les fit sauter du casque.
Le rubis et l'émeraude furent perdus. Un soldat suisse trouva le diamant et le vendit à un prêtre pour un florin.
Il passa des mains du prêtre dans celles d'Antoine, roi de Portugal, qui, fuyant de ses États et errant en Europe, s'en défit dans un moment de gêne pour cent mille francs que lui compta Harlay de Sancy, trésorier général de France.
. De là vient que le diamant prit le nom de Sancy.
Harlay de Sancy fut envoyé comme ambassadeur en Suisse. 
Il se trouvait à Soleure, lorsque Henri III lui écrivit :
« Envoyez-moi votre diamant par un homme sûr, afin que je m'en fasse une ressource d'argent. »
Le domestique qui, en effet, était un homme sûr, dit à son maître en partant :
Si je suis arrêté par des voleurs  j'avalerai le diamant. Ou les voleurs me. tueront et alors vous demanderez mon corps ; ou ils me laisseront passer et alors .le 'diamant arrivera à sa destination.
Le domestique partit avec le diamant, fut attaqué par des voleurs, l'avala, et fut tué d'un coup de poignard.
Sancy fit revenir le corps de son fidèle serviteur, en fit faire l'autopsie et retrouva le diamant.
Cette pierre précieuse, qui pèse cent six carats, fut vendue par Henri III, à qui Sancy la renvoya, à des juifs allemands, chez lesquels on la perd un instant de vue. On sait seulement qu'en 1668, le Sancy appartenait à Jacques II qui le vendit à Louis XIV. Louis XV le porta à son couronnement, puis pendant cent ans il disparaît, puis enfin il est vendu au grand veneur de l'empereur de Russie, qui le paye cent mille roubles, c'est-à-dire deux millions.
A l'époque où je fis Monte-Cristo, voulant introduire une empoisonneuse dans mon roman, je me mis avec acharnement à faire de la chimie avec mon ami le vicomte de Ruolz.
Il avait déjà, à cette époque, trouvé l'argenture et la dorure sur métaux.
Il portait d'habitude, à sa cravate, un petit diamant qu'il avait fait lui-même en cristallisant du carbone.
Seulement, comment la transmutation s'était elle opérée? Il n'en savait rien lui-même. Un beau jour, dans le creuset abandonné depuis près de trois semaines, le diamant, gros comme un grain de chènevis, s'était trouvé tout formé. Sous quelle condition de chaleur factice, sous quel rayon d'ardent soleil la transmutation tant cherchée au grand jour s'était-elle mystérieusement accomplie? Il n'en savait rien lui-même, mais le fait était là.
Ce diamant fut estimé 80 francs.
Ici, vous le comprenez bien, la discussion n'est point dans la grosseur du diamant, mais dans le fait de sa mutation de carbone en cristal; il est évident qu'un jour ou l'autre on fera du diamant artificiel et que dans cette recherche M. Desprez a déjà obtenu des résultats remarquables.
Le grand malheur de l'alchimie, qui a préparé tant de découvertes précieuses à la chimie sa fille, est de s'être occupée de la transmutation de l'or, transmutation impossible, puisque l'or est un corps simple. Il est évident que si les grands alchimistes avaient usé à essayer de faire du diamant autant de temps qu'ils en ont usé à essayer de faire de l'or, ils eussent incontestablement réussi.
Maintenant un homme qui n'est aucunement chimiste vient de trouver, non pas la mutation du carbone en diamant, mais un diamant nouveau, aussi beau, aussi pur que les plus beaux et les plus purs diamants sortis des mine de l inde et du brésil.
Le nom de la pierre, du cristal, du quartz, du mica, d'où il le tire, est un secret. Le plus habile lapidaire s'y trompe.
Cet homme, s'il eût été un fripon, faisait sa fortune du coup. Une paire de boucles d'oreilles vendue par lui à un capitaine au long cours pour la somme de vingt francs, a été vendue par celui-ci au premier lapidaire de New- York pour la somme de vingt dollars.
Mais ce n'est pas une erreur, ce n'est pas sur une spéculation déloyale que l'intelligent inventeur a établi ses espérances de bénéfices. Il sait combien de vols de diamants ont été accomplis, et, les diamants une fois volés et surtout une fois démontés, quelle est la presque impossibilité de les reprendre aux voleurs.

Il y a eu, depuis cent ans, trois fameux vols de diamants.



Le premier est celui des diamants de la couronne, fait au Garde-Meuble en 1792.
Un décret de l'assemblée avait ordonné que l'inventaire des diamants de la couronne fût fait. On avait l'habitude à cette époque de les exposer, depuis la Quasimodo jusqu'à la Saint-Martin, le premier mardi de chaque mois.
Après les journées du 10 août et du 2 septembre, on craignit pour ce riche dépôt, puis il fut enfermé, et la commune de Paris, qui avait la gérance du domaine de l'état, mit les scellés sur les armoires dans lesquelles étaient déposés la couronne, le sceptre, la main de justice, les autres ornements du sacre, enfin la chapelle d'or léguée à Louis XIII par le cardinal de Richelieu; plus, la fameuse nef d'or pesant 600 marcs.
A ces objets était jointe une quantité prodigieuse de vases d'agathe, d'améthyste, de. cristal de roche, etc., etc.
Tous les trois jours, Sergent et deux autres commissaires de la commuue faisaient une visite au Garde- Meuble.
Le 17 septembre, à peine entrés dans le Garde-Meuble, ils s'aperçurent que des voleurs s'étaient introduits en escaladant la colonnade, avaient brisés les scellés, forcé les serrures et enlevé le trésor.
Aucune trace de leur passage n'était restée. On fit de nombreuses arrestations, mais qui n'amenèrent aucun éclaircissement.
Un jour, vers le 24 septembre, Sergent reçut une lettre anonyme qui lui indiquait qu'une partie des objets volés était enfouie dans un fossé de l'allée des Veuves.
Sergent prévint ses collègues. Une fouille fut faite, et l'on retrouva le diamant le Régent et la coupe connue sous le nom du calice de l'abbé Surger.
Beaucoup de bruits coururent à cette époque ; les uns dirent que le vol avait été fait au profit des émigrés, les autres que l'argent provenant du vol avait servi à payer l'insurrection de la Vendée qui devait éclater le 10 mars suivant.

Le second vol de diamants qui a laissé un souvenir dans la société parisienne est celui de la princesse Santa- Groce, née Belmonte-Pignatelli et veuve d'un prince romain.
Elle s'était réfugiée en France à la suite des revers éprouvés par nos armées en Italie pendant que Bonaparte faisait la conquête de l'Égypte.
Mme Santa-Croce, très-riche, tenait en exil une petite cour. Au nombre des famillières de la princesse se tenait une Mme Goyon des Rochettes, veuve d'un ancien gouverneur de Longwy et passant pour être mariée au comte Lamparelli, également exilé.
Un certain marquis de Loïs, nouvellement rayé de la liste des émigrés et de retour à Paris depuis un mois, vit à l'Opéra la princesse couverte de ses diamants, et près d'elle une très jolie femme qui n'était que Mme Lamparelli.
Alors vint au marquis de Loïs cette méchante idée de faire sa maîtresse de Mme Lamparelli et de se servir d'elle pour voler les diamants de la princesse.
Au bout de huit jours la moitié de la besogne était faite; restaient les diamants.
On s'associa deux voleurs de profession nommés Bisson et Fresneau, et un soir que la princesse dînait chez l'ambassadeur d'Espagne, le vol fut consommé.
Les deux voleurs, en possession des parures de la princesse, se rendirent immédiatement chez un joaillier du Palais-Royal connu parmi les voleurs pour acheter les objets de provenance suspecte.
Le joaillier commença par voler les voleurs d'une assez singulière façon : parmi les diamants, il y en avait un de la grosseur d'une noisette qui valait 10,000 francs; le joaillier avait par hasard en imitation, un morceau de cristal taillé, de la même grosseur et du même aspect ; il escamota adroitement le vrai diamant, après l'avoir démonté, parut examiner l'autre avec attention, déclara que le diamant était faux, et comme preuve, il l'écrasa d'un coup de marteau.
Les voleurs ne reçurent donc qu'une somme de 15,000 francs qu'ils partagèrent loyalement avec ceux qui leur avaient fait faire le coup, puis il disparurent.
Le joaillier du Palais-Royal avait gagné à lui seul 150,000 francs.
Des recherches furent faites, mais d'abord sans résultat aucun. La princesse était loin de soupçonner sa meilleure amie et le marquis de Loïs d'être complices d 'un pareil vol : mais voici ce qui arriva :
Fresneau et Bisson avaient trouvé dans une armoire du galon d'or à livrées ; ils s'en étaient emparés.
Pensant que dans un vol aussi important que celui des 300,000 francs de diamants, on ne ferait aucune attention à un mètre ou deux de galon, ils allèrent pour le vendre à un fripier.
Mais les galons étaient portés sur le catalogue des objets soustraits qui avaient été affichés et distribués à profusion. Le fripier les reconnut, fit arrêter les voleurs, et, grâce à leurs révélations, tous les coupables furent bientôt entre les mains de la justice.
Le marquis et le joaillier furent condamnés à douze ans de fer ; Mme Lamparelli à douze ans de réclusion.
Elle et le marquis moururent sans avoir eu le temps de subir leur peine.
Le joaillier sortit en 1813 du bagne de Rochefort. 


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Tout le monde se rappelle le fameux vol des diamants de Mlle Mars.

Anne-Françoise-Hippolyte Boutet, dite Mademoiselle Mars, est une comédienne française, née le 9 février 1779  à Paris où elle est morte le 20-mars-1847
Les diamants les plus connus sont ceux des actrices. Quoique forts nombreux, ceux de Melle Mars avaient paru si souvent devant le public, que le public eût pu, presque aussi bien qu'elle, en faire le catalogue.
Je me rappelle très-bien les détails de ce vol parce qu'il fut fait le t9 octobre 1827, quelques jours après la lecture au Théâtre-Français de mon drame de Christine, qui m'avait, d'une façon un peu plus familière ouvert les portes de l'hôtel de MIlB Mars.
Elle avait pour femme de chambre une Suissese, née à Orbes et nommée Constance Richard; cette femme de chambre était mariée avec un nommé François-Jean Mulon, qu'à cause de son teint bruni, on appelait familièrement Scipion l'Africain.
Mlle Mars avait la plus grande confiance en Constance; c'était elle qui était chargée de porter au Théâtre-Français et d'en rapporter le coffret renfermant toutes les parures de Mlle Mars, lesquelles pouvaient atteindre une valeur de 450 à 500,000 francs.
Le 19 octobre 1827, Mlle Mars, qui ne jouait pas, dînait chez Mme Armand, femme du sociétaire du Théâtre- Français, bien connu sous ce nom, avec lequel il a, pendant soixante ans, joué les jeunes premiers et les amoureux.
Vers onze heures du soir, Armand, qui n'avait pas dîné avec ces dames, entra, s'approcha de Mlle Mars et lui dit :
Ma chère camarade, armez-vous de tout votre courage; j'ai une mauvaise nouvelle à vous apprendre.
Pourvu qu'il ne soit rien arrivé à ma bonne mère ou à mon beau-père, l'excellent 
Walville, vous pouvez tout me dire, mon cher Armand, répliqua avec calme Mlle Mars.
Tranquillisez-vous, il ne s'agit que d'une perte d'argent : vos diamants sont volés.

Mlle Mars n'était pas très-riche à cette époque; une perte de 500,000 francs, douloureuse pour tout le monde, l'est encore plus pour une artiste, surtout lorsqu'elle porte sur des bijoux dont elle se sert tous les jours.
Mlle Mars jeta un cri, demanda ses chevaux et partit.
En arrivant chez elle, Mlle Mars trouva le commissaire de police qui verbalisait.
C'était Constance elle-même qui, pour dérouter les soupçons, avait dénoncé la disparition de la cassette qu'elle avait remise à son mari. Aussi personne ne songeait à elle, lorsque des nouvelles arrivèrent de Genève et dénoncèrent le coupable.
Mulon avait démonté les diamants, et des parures il avait fait un lingot d'or, qu'il avait voulu vendre à un orfèvre à son arrivée à Genève.
Le vol de diamants avait été relaté sur tous les journaux. L'orfèvre genévois se douta de quelque chose; il fit arrêter Mulon. Déjà quelques soupçons planaient sur lui : on avait su qu'il avait quitté précipitamment Paris et qu'il avait changé, avant de partir, deux billets de banque pour de l'or.
Outre les diamants, deux billets de banque avaient été volés : c'était évidemment ceux-là que Mulon avaient changés avant de partir. Mais Mulon arrêté, les diamants ne se retrouvaient pas : il prétendait les avoir jetés, en passant, dans le Rhône, de peur d'être poursuivi et dénoncé par eux.
Un hasard providentiel empêcha qu'ils ne disparussent. Mulon avait été arrêté et conduit à la prison, tel qu'il était vêtu lors de sa visite chez l'orfèvre. Une fois en prison, il demanda ses vêtements et surtout ses bottes.
Cette insistance à demander ses bottes inspira des soupçons à l'agent chargé de transporter la garde-robe au cachot de Mulon, il fouilla dans les bottes et y trouva les diamants. Il n'y avait plus à nier. Il s'agissait de l'extradition. On fut deux mois à la solliciter du  
gouvernement suisse.
Amené en France, Mulon fut jugé à Paris le 31 mars 1828.
Devant le tribunal il fut convaincu et finit par avouer.
Voici comment le vol s'était opéré : Du moment où il fut convenu, Constance ouvrit chaque soir une fenêtre du rez-de-chaussée qui communiquait avec la rue de La Roçhefoucauld. Mulon, qui se promenait de long en large dans la rue, s'approchait de la fenêtre où Constance lui disait : « Impossible ! madame dîne à la maison. »
Enfin, le jour où Mlle Mars dîna chez Armand, Constance tendit la main à son mari qui escalada la fenêtre, armé d'une pince, fit sauter la serrure du meuble qui renfermait le coffret, prit les deux billets de banque qui se trouvaient dans le secrétaire et sortit par le même chemin par où il était entré.
Mulon et sa femme furent condamnés chacun à dix ans de travaux forcés.
Le premier subit sa peine au bagne, où nous allons le retrouver tout à l'heure; quand à Constance, les portes de Saint-Lazare ayant été forcées à la révolution de 1830, elle en profita pour s'évader.
Mlle Mars avait alors cinquante-trois ans; tous les journaux racontèrent, qu'interrogée sur son âge, suivant l'habitude, par le président, elle avait répondu à voix basse d'une façon presque inintelligible : Trente-neuf ans!
La chose est possible.
Cette publicité donnée à l'âge d'une femme, qui représente tous les soirs des ingénues, des amoureuses et des jeunes premières, devait être redoutée de l'illustre comédienne ; mais tous ceux qui ont fréquenté sa maison avec une certaine familiarité, ont vu dans son salon un petit meuble de Boulle qui avait été donné à sa mère par Marie-Antoinette. La mère de Mlle Mars était accouchée le même jour que la reine.
Marie-Antoinette fit un cadeau à toutes les femmes de France accouchées le même jour qu'elle. Ce petit meuble de Boulle portait la date de la naissance de Mlle Mars, laquelle remontait, comme celle de la duchesse d'Angoulême, à 1778.
Or, jamais Mlle Mars n'a cherché à cacher son âge à ses amis.
En 1834, visitant le bagne de Toulon, je m'entendis appeler par mon nom.
Je me retournai.
Celui qui m'appelait était un forçat tenant une petite boutique de coco sculpté, de paniers en pailles et d'autres bimbeloteries telles qu'on en fait au bagne.
J'allai à cet homme, tout étonné de ma popularité, qui était descendue jusque chez les bonnets rouges.
Cet homme avait l'air parfaitement heureux ; il m'accueillit avec un sourire joyeux, me laissa quelque temps fixer les yeux sur lui et me dit :
Allons, je vois bien que vous ne me reconnaissez pas.
Je dois avouer, répondis-je, que je ne me rappelle pas où j'ai eu le plaisir de vous voir.
Oh ! je m'en rappelle bien, moi, dit-il. C'est chez Mlle Mars que je vous ai vu.
Ah ! fis-je, en effet.
Oui, oui, dit-il en riant. C'est moi qui lui ai volé ses diamants.
Il paraît que vous ne vous repentez pas trop de l'affaire ?
Ah! non, monsieur, et je ne changerais pas ma place contre celle de cocher, que j'avais à ce moment-là.
Vraiment!
D'abord, monsieur, ici, je suis on ne peut plus considéré; il n'y a pas une personne qui vienne, qui ne dise aux surveillants : « Montrez-moi donc Mulon, celui qui a volé les diamants de Melle Mars. »
Alors les personnes viennent et me font mille politesses; je leur donne des détails sur le caractère de Melle Mars, çà les intéresse.
Elle n'était pas bonne, vous savez, Melle Mars.
Le fait est qu'elle avait ses jours.
Oui, qui venaient plus souvent que tous les dimanches.
Voyons, qu'est-ce que vous allez m'acheter, monsieur Dumas?
Montrez-moi vos bibelots.
Je lui achetai en effet pour une dizaine de francs. Nous causâmes un quart d'heure. Ce drôle-là .avait connu tous ceux qui venaient chez Melle Mars, et par conséquent tout notre monde artistique. Je comprends que sa conversation devait avoir un certain intérêt pour le public voyageur, toujours inquiet d'anecdotes;
En 1834, époque où je le vis, il n'avait plus que quatre ans à faire; mais lorsque son jour de sortie fut arrivé, ce fut lui qui ne voulut plus sortir, il avait amassé pendant ses dix années de bagne, dans son commerce de chinoiseries, une dizaine de mille francs. Libre et sortant, pouvant compléter son étalage, il espérait gagner le double . Gomme il s'était très bien conduit pendant ces dix ans de bagne, je crois que la permission lui fut accordée d'y rester dix autres années.




1880 Journal du Loiret

Eh bien, voilà ce qui arrivera, quand on connaîtra les imitations de M. Framinet :
C'est qu'on aura, pour la satisfaction de. son amour- propre, des. diadèmes, des colliers, des bracelets, des boucles d'oreilles en vrai diamant qui resteront soigneusement enfermés dans quelque endroit inaccessible aux voleurs et que l'on montrera à ses amis. Ces diamants véritables seront imités à s'y méprendre par les diamants feux Framinet. Une parure de trois mille francs fera l'effet d'une parure de cent mille, et ceux-là que les femmes du mondé mettront pour aller au bal, et les artistes dramatiques pour aller au théâtre. 




Les voleurs s'y tromperont d'autant mieux, que, moi, qui croyais me connaître en diamants, suis resté ce matin dans une hésitation de quelques minutes pour reconnaître à la loupe, au milieu d'une boite de bagues, les bagues portant des diamants faux des bagues portant des diamants vrais, et je le répète, parce que c'est là où est ma conviction, c'est pour le théâtre surtout que cette invention si remarquable va être utile.
Les artistes qui ont de vrais diamants tremblent toujours pour leurs pierres; elles ont peur du coiffeur qui entre dix fois par soirée dans leur loge ; elles ont peur de leur femme de chambre, chargée du soin de la précieuse- cassette; elles ont peur de tout et même des amies qui viennent les voir.





Plus de craintes pareilles : qu'elles fassent monter ces nouveaux diamants, et je défie, si la monture et l'écrin sont absolument pareils, qu'elles distinguent elles-mêmes l'écrin qui renfermera la parure de 500 fr. de celui qui renfermera la parure de 100,000.
Eh bien, quand les voleurs ne seraient retenus, ne pouvant distinguer les diamants vrais des faux que par la crainte de voler de faux diamants au lieu de vrais et d'aller aux galères pour un vol de cinquante francs, cette invention, il me semble, aurait déjà rendu un grand service à la société, en jetant le doute dans l'esprit de ces illustres industriels.
Puis, au point de vue moral, une jeune fille belle et sans fortune débute, et presque toutes débutent dans ces conditions ; elle a besoin pour ses débuts de colliers, de bracelets, de bagues, de peignes, de bijoux enfin; elle craint d'être ridicule en portant des bijoux visiblement faux; elle craint d'être compromise en portant des bijoux vrais. Du moment où il sera impossible de distinguer les bijoux vrais des faux, elle  achètera des bijoux faux, et ce ne sera dix ou vingt mille francs qu'il faudra pour ses débuts , ce sera trois ou quatre cent francs

Signé Alexandre Dumas.

Notre grand alexandre Dumas fut quand même abusé car Framinet vendait apparemment du verre au plomb 



Et dans le courrier des hotels et guide du commerce en 1871 il est enregistré "Bijouterie fausse"

En 1893 Framinet vendit son affaire à un dénommé De Bluzze qui avait encore plus que lui le sens de la réclame"....plus c'est gros.....".



Ci-dessous texte publicitaire  qui de nos jours serait interdit


Cela me rappelle les émeraudes Gilson, qui reconstituait à partir de vilaines émeraudes des émeraudes pures, plus belles que les vraies (enfin, c'est ce qu il disait!!!)


Revue de la BIJOUTERIE? JOAILLERIE , ORFEVRERIE de JUILLET 1902 , Exceptionnelle!!

En préparant mon dernier article sur Georges DERIBAUCOURT, faisant des recherches sur Gallica, je me suis aperçu qu'il manquait un numér...