dimanche 8 avril 2018

1968-2018. 50 ans! quels bijoux cette année là ?



Quelle année! Partout dans le monde des évènements de révolte, en France sous suivions de près le printemps de Prague, Elu,  Dubcek désire un "socialisme à visage humain" (mais en régime communiste, la  répression ne tarda pas )Cela bougeait partout,  les Italiens qui commencent avant les étudiants français ce sera la bataille de Valle Guilia, affrontements à la suite de l’évacuation par la police de l'université de Rome occupée par les étudiants, mais nos étudiants gauchistes suivent et , le 10 mai la Sorbonne est occupée. Une grève générale est fixée au 13 mai par les syndicats. Le 15 mai les usines Renault de la région parisienne sont occupées par les ouvriers et le théatre de l Odéon par les étudiants, devient un forum permanent.  Des barricades sont de nouveau érigées dans la nuit du 24 mai. Le 27 mai les accords de grenelle sont signés entre le gouvernement et les syndicats, Le général de Gaulle annonce la dissolution de l’Assemblée nationale le 30 mai  il est soutenu par une manifestation monstre sur les Champs-Élysées et dans toutes les villes de province.
Le 16 juin la Sorbonne est évacuée par la police.



Mais il faut continuer à vivre, il faut payer les salaires, préparer la vie d'après la "révolution", mon père et ses amis du groupe des "Joailliers Français" Vaneste à Lille, Jacot à Nancy , Daguzé à Nantes, Richard à Rouen (mes parents), Beaumont Finet à Lyon, Bornand à Marseille, Michelon à Montpellier, Dejouy à Dijon, Daleau à Poitiers, Gonnet à Angers, Girolet à Orléans, en dernier avec une pensée spéciale, Peyrot Rudin à Nice. Ces Joailliers avaient eu l'idée de faire une coopérative d achat en 1957, puis en 1959 une société coopérative de fabrication, la Cofajo, ce qui permettait d' avoir ses modèles exclusifs à mettre dans le  catalogue réalisé en  commun. Chacun apportait ses idées, ses modèles, une grande entraide régnait entre-eux.



Sur cette page du catalogue, figuraient les auteurs et acteurs précédents de notre catalogue

Ces joailliers éditaient ensemble un catalogue de bijoux, à l' époque une merveilleuse idée à expédier à leurs clients. Chaque année, un artiste différent parrainait ce catalogue, une oeuvre de lui faisait la première page et souvent la suivante.
En 1968 ce fut le cas, mon père avait proposé un peintre rouennais , Jean Bréant plutôt paysagiste, mais qui réalisa cette couverture pour le texte d'un autre Rouennais: André Maurois.
la firme Fraenckel-Herzog était dirigée par  le père d André Maurois  en collaboration avec les chefs de ces familles. Sa mère était une femme d’une grande distinction et d’une haute culture.Il fit ses études au lycée hors classe, le Lycée Corneille, de Rouen à partir de la 3e.
Autre grand élève du lycée corneille (il y en eut beaucoup) Jean Lecanuet qui justement fut élu maire de Rouen le 4 avril 1968 avait épousé Denise Paillard, amie de ma mère. Mon grand père fut à la fois l'un des professeurs de Jean Lecanuet et son surveillant général au Lycée Corneille.
Denise était juive,sa mère s'appelait Sarah Marguerite Levy  et André Maurois de son nom Herzog l'était aussi.


Ci dessous le texte poétique qu'André Maurois écrivit sur ce qui lui inspiraient les bijoux



"Les Bijoux rendent plus belles les femmes"



"Sans les bijoux la femme se sent nue, , mais sans elle, les bijoux ne sont que des pierres"



Les premières pages commençaient toujours par les bijoux les plus chers, attention, ce sont des Joailliers de Province, ayant une clientèle d'abord locale, aucun n'était installé à Paris, au contraire, nous nous défendions contre les grands de Paris (afin éviter que notre clientèle ne devienne infidèle), Alain Dominique Perrin n'était pas encore rentré chez Cartier pour y créer "les Musts" , et Carrefour et Leclerc n'avaient pas encore créé de rayon bijoux dans leurs premiers Hypermarchés
De cette page je retiendrais les alliances brillants qui étaient l un des meilleurs cadeaux d'anniversaires de mariage




l’éclat fascinant du saphir, limpide et profond à la fois, convenait bien à la lumière de la Normandie.
Difficile à vendre, à l' époque à force de voir des saphirs noirs, les gens croyaient que c'étaient les plus beaux. Tout jeune gemmologue (26 ans en 1968 ) je faisais tout pour leur transmettre
l' enseignement que j' avais reçu de Dina Level (elle adorait les Ceylan) Dur de faire admettre aux clients que le saphir Australien de Maman ne valait pas un pet de nonne, le Birman malgré son prix leur convenait, mais les Ceylan, pas du tout. Alors je faisais tout ce qu' un jeune vendeur pouvait faire, afin de leur faire aimer les Ceylan. Au moins j' avais l avantage d avoir un père avant moi car pendant des années et des années, je fus  "Richard fils" et pour Jean Lecanuet "Le petit Doussot" son ancien prof.


J aimais cette rose , très classique mais si délicieuse sur un revers, et ces bracelets de Lenfant et Delhomme Gesdel , sur lesquels on pouvait ajouter des motifs de pierres .
C'était (à mon grand regret) l' or gris qui dominait dans ces années là. Je n aimais pas la couleur (le platine oui, mais l or gris, c'est gris.)


Les éternels colliers de perles que devait se faire offrir à 18 ans toute jeune fille bien née


De même ces bagues de fiançailles , bagues à entourages, marguerites, toi et moi etc


En haut à gauche l'anneau que nous nommions  "anneau romain". 
les "fontes" se "démocratisaient nous faisons gagner du temps mais pas de chalumeau laser , et réparér les "trous" était lassant.


On pouvait traiter l' anneau romain simplement,  où avec toutes sortes de motifs, en 2006, je m en servais encore et ce n'étaient jamais les même bagues, de même pour le corps de bague gaudronnées (et non goudronnées comme disaient certaines clientes)



Le Corail était difficile à vendre



Encore un anneau romain avec une turquoise et surtout ce superbe oiseau de lumiere de 6cm50 sur 5


Tres beaux bracelets


Les trèfles à quatre feuilles  et les papillons, avant Van Cleef et Arpels



Les coeurs. Tous les ans un nouveau coeur, et cela se vendait à coup sûr, il y avait encore des vêtements épais, des revers, pour porter des broches


Les hommes portaient encore des bijoux, la traditionnelle gourmette en or ou avec plaque d identité
Ils portaient des boutons de manchettes (même moi)  email et or, (bleu et turquoise) de chez De Perçin, certainement la collection la plus riche de boutons de Manchettes. La montre étrier de même.
Evidemment la chevalière avec initiales à l anglaise ou  avec des armoiries.


Les montres de marques ont bien changé, bien que l'Omega constellation date de 1952, celle ci était certifiée "Chronomètre" gage de sa précision et un poids d'or,,
Je trouvais cela difficile d'ajuster des portes montres en or sur les grosses boites de montres surtout avec la soudure d un tube près de la boite, le réglage des "pattes" en dessous , souder sans que la soudure ne coule vers le dessus du bracelet......


Deux pièces intéressantes  au centre le mouvement  "Bâton" c'est Jaeger qui nommait ainsi le mouvement réf. 566.110, 

C'est un très beau mouvement avec toutes les pièces sur une verticale, plus tard on l' appellera "mouvement Baguette" c'est quand même plus chic. Dans les années 70 Jaeger acceptait de ne fournir que le mouvement, ce qui me permettait de faire de jolies et sobres pendulettes, par exemple  sur une plaque de zoizite  je fixais le mouvement, avec des vis en perçant la plaque de zoizite , je fabriquais des petites fausses pépites d or en laissant tomber l or en fusion dans une gamelle avec de l huile  et je les disposait comme plots horaires par ordre croissant, mais Jaeger n'a plus fourni de mouvement



Piaget , merveilleuses montres à l époque, très plate, montres joaillerie avec des bracelets de grandes qualité et justement... j avais été en mars 1968 à la Foire de Bâle, en voiture par l' Alsace, et pour le retour, descente jusqu'à Genève. En route nous fumes reçus magnifiquement par le DG des montres "Mido" qui produisaient un très beau boitier étanche d une seule pièce et c'est le verre et sa lunette qui fermaient la montre, nous en avions vendu beaucoup. Je me souviens de son admiration et de ses connaissances sur Napoléon qui a fait le code civil Suisse.

Devenus départements français, Genève et l'ancien évêché de Bâle reçoivent le Code Civil Français dès 1804. La République helvétique n'étant pas parvenue à rédiger un code des lois civiles, plusieurs cantons latins de la Suisse adapteront le CCF à leurs besoins, à leurs traditions juridiques et à leur pratique judiciaire: Vaud (par étapes, 1811-1812 et 1819), Tessin (1837), Valais (par tranches de 1842 à 1853), Fribourg (par parties, de 1834 à 1850), Neuchâtel (1854). Durant tout le XIXe s., d'importantes lois spéciales (sans oublier les concordats entre cantons, les traités, le développement progressif de la législation fédérale) transforment aussi, avec plus ou moins d'originalité, les institutions civiles issues du Code Napoléon, ceci dans des domaines particulièrement sensibles, tels que le droit des personnes et de la famille, les successions ou la publicité des droits réels. Tout en reprenant à son compte plusieurs critiques adressées au CCF ou à ses interprètes, Eugen Huber fera du Code Napoléon une des grandes sources du code civil suisse . Très bon souvenir et de plus il nous avait réservé une très belle chambre à Lucerne sur le lac.


Je fus très surpris en arrivant à la Côte aux Fées la manufacture était un peu moins grande que maintenant, mais je m attendais à une usine, l un des deux frères Piaget nous fit visiter. 
Accueil excellent et le lendemain midi nous étions invités à dîner par Yves Piaget à Geneve .
Je n'étais a 26 ans que le fils du patron, mais je fus reçu comme si c'était mon père.
Maintenant la maison Piaget appartient au groupe Richemont.



Ceci était la dernière page du catalogue de 1968. Le joaillier de Province était encore un joaillier de famille, souvent avec un atelier, il pouvait créer ses modèles d un prix important.

1968 publicité Presse


En 1968 Cartier recevait Maria Felix et exécutait pour elle un extra-ordinaire collier .


COLLIER SERPENT CARTIER PARIS, COMMANDE DE 1968
Platine, or blanc et or jaune, 2 473 diamants taille brillant et baguette pour un poids total de 178,21 carats, deux émeraudes de forme poire (yeux), émail vert, rouge et noir.
Commande de María Félix qui vecut de 1914à 2002).
La diva mexicaine archétype de la femme fatale à la mode latine s’imposa au Mexique et en France en rayonnant dans les films d’Emilio Fernandez, Jean Renoir et Luis Buñuel. Elle était une grande amoureuse des reptiles. Longueur 57 cm..

1968 ce furent aussi pour beaucoup quelques mois de rèves, 


D autres étaient moins rèveurs et "libération" titra:  
SPECIAL MAI 1968. Ce jour-là, mardi 28 mai. Mitterrand tente le putsch.

Vous avez des commentaires, des souvenirs, vous pouvez le faire ci-dessous ou m'adresser un mail à : richard.jeanjacques@gmail.com

1 commentaire:

  1. Bonsoir
    Je vais vous sembler un peu hors sujet, mais en voyant vos publications je me dis que vous auriez peut-être des conseils ou des pistes de recherche à me suggérer, étant donné que vous êtes un peu un historien de la joaillerie.
    Mon père aimait profondément ma mère et il aimait profondément lui voir porter des bijoux sortant du commun. Il avait un joaillier quasiment attitré : Gonnet à Angers. Tout cela remonte très loin dans le temps. Au décès de ma mère, ma sœur et moi-même, nous nous sommes partagés ses bijoux. Tout récemment, ma sœur a été cambriolée et, les voleurs ont fait main basse sur ceux-ci. Bien entendu nous n’avons ni facture, ni photos… comment demander à la compagnie d’assurance d’évaluer cela ; sans parler de la valeur affective que ces trésors représentaient. Gonnet n’existe plus apparemment à Angers… Sauriez vous qui a repris cet établissement ? Peut-être ont-ils conservé les archives de leur prédécesseur… Vous êtes un peu mon dernier espoir d’une piste, même ténue.
    Je vous prie de recevoir l’expression très respectueuse de ma considération , notamment pour la très haute qualité de documentation pour vos publications.
    Michèle Dorchies

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